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Interrogatoire

Mystiana
Mystiana
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Jeu 30 Juil - 10:16
Mystiana
Il doit être heureux, il doit sourire. Au moins pour aujourd'hui. Après tout, ce n'est pas tous les jours son anniversaire. Il a dix-huit ans, une fête enthousiaste et joyeuse doit se dérouler en ce moment même. Pourtant, des larmes et des lamentations s'écoulent d'une porte à moitié fermée. Minuit sonne, les lumières s'éteignent, les voix se taisent et la douleur lancinante brûle son âme
Personne, même pas lui, ne sait pourquoi tant de détresse inonde son cœur. Il réfléchit trop, dépasse les limites des connaissances humaines pour se jeter dans la gueule de la créature que l'on peut nommer « Incompréhension », « Inconnu », « Peur » ou même « Mort ».

Sa bouche s'entrouvre et un sifflement rauque et tremblant s'en échappe. Sa respiration est saccadée. Il relève doucement la tête et plonge ses yeux chocolats dans les iris bleus pâles qui se trouvent face à lui. Aucune surprise ne se lit sur son visage, seulement une sombre mélancolie.
La fillette blonde flotte au-dessus du matelas. Son regard, curieux mais calme, est perçant. Obnubilé par ces miroirs étincelants bloqués dans leurs orbites, il n'entend pas l'unique mot prononcé.

« Pourquoi? »

Un long silence suit cette déclaration. Ses lèvres s'éloignent l'une de l'autre et sa voix brisée, vieillie par le temps, retentit en un écho insoutenable.

« Que se passe-t-il ? 
Je … je n'en sais rien, ses paroles instables jaillissent difficilement de sa gorge, fatiguée par de trop nombreux sanglots.
Pourquoi pleures-tu ?
Je crois, je crois que j'ai peur. »

Un regard terrifié mais suppliant se pose sur la mine neutre de la fille. Il scrute chaque parcelle de sa peau et de ses doux yeux inexpressifs. Il aimerai arrêter cela, faire taire ce ton sage et ancien qui contraste à merveille avec le physique angélique et insouciant de l'enfant. Il ne peut pas. S'il l'efface, il perdra toutes ses chances d'avancer. Alors il répond, inlassablement. Depuis que le doute est apparu, depuis ses treize ans, ces questions se posent toutes seules. Au fil du temps, il a réussi à placer un être sur ses interrogations. Cette jeune fille sans nom, l'a-t-il créée de tout pièce ou bien est-ce véritablement la réalité ?

« De quoi as-tu peur ?
De la mort. »

Il avait tressailli de surprise et répondu sans réfléchir. Il se rend soudainement compte de ses propres paroles, les yeux écarquillés.

« Pourquoi ?
Elle peut arriver à tout moment et à n'importe qui. Ce n'est pas une chose que l'on peut contrôler ou recommencer. Il n'y a pas de bouton « Replay » après le « Game Over ». Chacun à sa propre vision du monde. La mienne est juste … effrayante. »

Un léger haussement des sourcils démontre qu'il a obtenu toute son attention et qu'elle l'incite à continuer. Il déglutit avant de reprendre son récit.

« Et bien … certaines fois, je me l'imagine comme une sorte de trou noir. Sans sol, sans plafond, sans mur, sans droite ou gauche. Rien que le néant. Un silence pesant mêlé à une obscurité sans faille. C'est un « monde » où l'on ne peut ni penser, ni bouger, ni voir, ni parler. Là-bas, nos cinq sens sont inutiles car ils ne sont plus. Ce n'est pas un rêve ou un monde imaginaire ? C'est seulement, enfin c'est mon point de vue, la réalité … et c'est terrifiant. »

Il prend sa tête dans ses mains et ferme les yeux. Il se retient de ne pas pleurer à nouveau. Sa respiration s'accélère, il ressent les battements de son cœur dans tout son corps. C'est comme si son crâne allait exploser sous les coups incessants d'un tambour. Il prend une grande aspiration et souffle lentement pour se calmer.

« Hormis cet « espace », je considère la mort comme un portail ou, plus précisément, comme une barrière. Pour alléger mon esprit et ma conscience, je peux représenter l'au-delà de la même manière que les chrétiens. Un paradis blanc et noir et, en guise de frontière, un grillage métallique. On peut voir l'autre côté à travers les mailles de fer et les barreaux étincelants de la seule entrée existante.
C'est à dire ?
C'est un peu semblable à un accident. Lorsque quelque chose de grave se produit, la police installe des barrières afin de sécuriser le périmètre. Quand un jeune enfant regarde ce spectacle, il peut avoir une fascination morbide mais inquiétante qui le pousse à ignorer cette interdiction malgré les risques qu'il encourt. Le côté où l'on est en sécurité est la vie tandis que le lieu de l'incident est la mort. Je … cela peut paraître un peu confus mais c'est ce que je pense »

Le son cesse pendant de longues minutes. La maison est enfin paisible. Le garçon est sans doute trop fatigué pour continuer ainsi.

« Pourquoi ? »

La voix persiste. Elle ne se fait ni plus rude, ni plus douce. Seulement froide et sans réelle émotion. Juste âgée, sage et monotone.
La réponse tarde à arriver. Elle finit par ne pas venir. Peut-être est-ce parce qu' il s'est endormi, épuisé par ses réflexions. Peut-être ne souhaite-t-il tout simplement plus ouvrir son âme et se livrer.
Dans tous les cas, il se tait et clos cette discussion. La nuit s'achève. C'est sans doute une des plus longues de sa vie.
Cette soirée est très importante pour lui. Il comprend enfin, au bout de cinq ans, ce qui le retenait. Ce n'est pas parce qu'il est majeur qu'il a deviné. Il est juste prêt à accepter la vérité. Elle le sait autant que lui. Maintenant, il ne lui reste plus qu'à combattre ses peurs. Il doit simplement les vaincre. Briser ce désarroi. Forcer l'ouverture de ce portail.


Les jours passent, les mois s'écoulent, les années s'enchaînent et chaque soir, elle revient pour le questionner, encore et encore. Ses phrase se font de plus en plus courtes et les réponses de plus en plus longues. Il suffit qu'un seul mot soit prononcé pour que le garçon approfondisse son raisonnement. Ce fameux et insistant « Pourquoi ? » devient important, quasiment essentiel pour qu'il puisse enfin avancer. A chaque fois, il doit découvrir le « pourquoi du pourquoi ? ».
Au fur et à mesure, la jeune fille se flétrit. De profondes rides apparaissent sur son front. Ses joues se creusent et ses cheveux or deviennent argent. Sa voix s'éclaircit. Son timbre craquelé s'adoucit. Son ton est insouciant et joyeux. Une fois de plus, il hait la différence flagrante qui oppose le physique au son.

Les yeux fermés, adossé à un arbre, il respire lentement. Trois ans après cette révélation, il comprend ce qu'il doit faire. L'éclat du soleil l'aveugle un instant. Il passe son poing droit fermé devant lui et les rayons se reflètent au loin. De légers tremblements le prennent lorsque son membre touche sa cuisse. Il attrape fermement son bras, espérant faire cesser cette incertitude.

« Calme toi, tout va bien se passer.
Pourquoi ? »

La vieille femme qui l'accompagne depuis tout ce temps apparaît. De nouveau, cette question est posée.

« Parce que j'ai affronté mes cauchemars. Je n'ai plus peur.
De quoi ?
De la mort.

Malgré sa surprise dû au changement soudain, il répond comme la dernière fois, directement et sans réflexions. Il reprend son monologue comme il a maintenant l'habitude de le faire ;

« Je me souviens que j'ai toujours aimé remplacer les mots par des images. La mort, par exemple, n'est pour moi qu'un portail attendant d'être franchi. »

D'un geste vif, il tranche tout ce qui le rattache à ses doutes, à ses rêves, à l'amour et au désespoir. Pour la deuxième fois consécutive, il lève son bras, la paume face à lui.

« Le rouge qui étincelle est une jolie couleur … »

Lorsqu'il prononce ses derniers mots, sa dernière phrase, l'ancienne femme, fruit de son imagination et de son esprit, s'efface en souriant.

« J'enjambe enfin, cette foutue barrière. »
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