Espoir quand tu nous tiens.

Dédié aux textes respectifs de Mich et Raikya qui m’ont motivé à voir le troisième point de vue. Merci à vous deux
 
Quelque part. Là où les ombres ne font qu’un avec la lumière et ou s’amusent les Dieux à créer et détruire. Là où les rêves se forment et ou naissent l’espoir et l’amour mais ou se cachent aussi la tristesse et la peur, accompagnées par la haine et l’envie, entourés par les ténèbres, cajolées par la lumière et rassurés par les couleurs mourantes.
À cet endroit, qui est le début de tout, s’inventent les histoires.
 
Elle le savait très bien, et avait accepté de venir rejoindre cet espace plus d’une fois. Elle s’y sentait bien, savait qu’elle y était en sécurité et que ce qu’elle imaginait s’y améliorait. Elle savait aussi que l’endroit où elle se trouvait de grandes parties de la journée n’était pas très lumineux. Bien sur, ce qu’elle formait n’avait rien à voir avec les gentillesses élaborées dans les parties claires. Non, ses écrits n’apparaissaient à la lumière que lorsqu’elle avait réussi à les montrer à ceux qui voulaient bien voir son travail, lorsque d’autres gens c’étaient appliquées à découvrir son monde. C’étaient eux qui rendaient ses pensées vivantes, qui les agrandissaient, qui les continuaient jusqu’à se perdre dans l’univers dont elle était le début.
 
Une fois de plus elle s’était aventurée là-bas. Elle avait enfilé sa grande cape noire et avait suivi le couloir qui l’amenait à son inspiration. Elle avait vu sa création grandir entre ses mains, elle avait senti que s’était bien, c’était le bon moment. Elle avait passée de longues heures à chercher, à analyser, à améliorer ce qu’elle voyait se dérouler devant ses yeux. Elle était, comme d’habitude, entourée d’ombres mouvantes, qui lui montraient ce qu’elle voulait. Mais maintenant était venu le moment qu’elle redoutait tant. Elle devait réussir à rendre vivant ce monde. Et pour ça elle devait trouver d’autres personnes. Des personnes dont elle savait qu’elle allait détruire, une fois de plus, tout leurs espoirs. Un petit moment elle se sentit coupable, se demanda si elle ne pouvait réellement rien changer dans son monde, mais les ombres qui l’entouraient lui montraient la réponse. C’était elle ça, son coté sombre, celui qui prenait le contrôle d’elle lorsqu’elle laissait son imagination monter dans ses pensées et qui s’amusait à créer pour plus détruire. La partie d’elle qui aimait faire souffrir ceux qu’elle aimait.
Elle prit donc une gouttelette du liquide dans son bassin et la laissa tomber dans une fiole transparente, mais qui dévia dans un bleu-violet sombre. Elle savait ce que ça voulait dire. La fiole contenait de l’espoir, mais aussi la douleur. Elle se déplaça. Son esprit entra dans la partie lumineuse, là où elle savait qu’elle trouverait les gens qui donneraient une partie de leur vie pour son histoire.
 
Elle s’approcha lentement de la cité en pierres chaudes, crée pour ceux qui, comme elle, voulaient faire vivre leurs histoires, leurs mondes. Elle passa entre les maisons jaunes et étroites, bondées de gens qui venaient voir les œuvres présentés ou qui étaient en train d’observer la gouttelette qu’ils avaient fait tomber grandir au fur et à mesure que les passants y jetaient un coup d’œil, tourna à gauche lorsqu’elle arriva à la grande place centrale ou un petit puits laissait couler avec un bruit léger son eau claire et fraiche, pour se diriger vers le quartier de la communauté sadique où elle se dépêcha de rentrer dans la ruelle des écrivains. Une fois arrivée devant la maison qui l’intéressait elle s’arrêta. Elle hésita un petit moment, observant comme à son habitude les lettres dorées et effrités qui recouvraient la vieille porte : Vos Remakes. Elle prit une grande inspiration. Le moment était venu.
Elle entra dans la grande pièce en bois clair et s’approcha de la vitrine. Des socles en bois beige sur lesquels étaient posées de petites coupes en porcelaine blanche semblaient l’attendre. Dans deux se trouvaient déjà des perles colorées. Des histoires d’autres gens qui les avaient laissées là. Une fois qu’une personne aurait agrandi les perles, elles seraient transportées dans une des chambres du fond réservées à leur nom où elles pourraient grandir et donner naissance au monde dont elles étaient venues. Elle ouvrit la fiole fragile et versa son contenu ombrageux dans une des coupelles nacre aux reflets argentés.
Maintenant, il ne restait plus qu’à attendre.
 
La jeune fille était heureuse. Enfin elle avait réussi à se débarrasser des différents objets qui lui barraient le chemin pour entrer dans la cité. Elle avait failli désespérer. Elle avait vu tellement de gens qui étaient entrés et sortis de la ville. Les chanceux. Is ne se trouvaient pas devant une montagne de devoirs, ou ce n’étaient que de petits tas, ceux dont en se débarrasse rapidement. Bien sur il y en avait qui avançaient encore plus lentement qu’elle, mais elle était pressée. Elle avait vu passer la personne qu’elle essayait de rejoindre, ou plutôt la personne qui transportait avec elle la petite fiole bleu-violette qu’elle attendait depuis une éternité comme elle en avait l’impression.
Mais maintenant c’était bon, elle y était. Elle passa rapidement entre les maisons, laissa de coté l’un de ses quartiers préférés, celui de « Youtube » avec ses habitations de toutes les couleurs, passa rapidement la place centrale et le puits ou elle aimait se reposer pour écouter la musique douce de l’eau, tourna à gauche et couru presque jusqu’à la petite ruelle des écrivains. Là elle ralentit, se laissa le temps de regarder les vitrines, salua quelque connaissances. Elle entra même dans la maison des histoires, mais il était clair que ce pour quoi elle était vraiment venue se trouvait autre part.
Sur les marches en pierre craquelée devant la petite maison se trouvait une autre fille. Elle pleurait. L’autre s’arrêta, hésitante. Elle se pencha vers la désespérée mais celle-ci secoua la tête en regardant la porte sombre dont le bois s’était usé au fil des passages.  La jeune fille était anxieuse maintenant, son impatience freinée par l’angoisse. Elle entra quand même, laissant ses doutes de coté et espérant intérieurement que son âme ne serrait pas définitivement détruite.
 
Une fois à l’intérieur elle ne jeta qu’un petit regard à la vitrine. Elle savait que la perle pour laquelle elle était là serait déjà bien vivante et donc dans une pièce au fond. Elle avait du retard.
 

 
Rien que le titre la fit frissonner. Il était écrit avec une encre rouge sang sur un petit bout de parchemin jauni accroché sur le mur à coté de l’ouverture de la salle. Elle poussa le simple rideau noir qui recouvrait cette brèche dans un autre monde de coté et se laissa emporter.
 
... Elle se retrouva dans le noir complet. Une personne était couchée dans son lit. Elle avait les yeux ouverts et regardait le plafond.  On voyait bien qu’elle était perdue dans ses pensées. Des idées sombres, des questions sans réponse. Tout cela se lisait sur le visage jeune mais vieilli par les évènements...
 
« Alors ?»
La question fit sursauter la jeune fille. Elle était sortie tremblante de la chambre. Elle n’avait pas pleuré, en fait elle allait même bien, comparé à l’effet que lui avaient déjà fait plusieurs fois ses visites. Malgré tout il lui avait fallu un moment avant de se ressaisir.
Elle regarda le visage impatient au dessus d’elle.
« Tu me fais peur. Tu ne peux pas empêcher la suite ! Je t’en prie… »
Lorsque l’autre ne répondit pas elle continua. Elle analysa  ce qu’elle venait de voir, essayant de prendre de la distance et de contrôler les émotions qui bouillonnaient toujours en elle. L’autre souri, la remercia, et lui répondit à tout ce qu’elle pouvait sans révéler la suite. Mais elle ne dit rien à propos de la première question. Les deux savaient la réponse. Elle ne pouvait pas.
 
La jeune fille se releva. D’autres choses l’attendaient loin de la cité. Elle jeta encore un regard suppliant vers l’autre fille mais son sourire en gâcha quelque peu l’effet. Elle ne pouvait rien faire de plus. Elle voyait bien la suite, avait des idées, sentait le mal grandir dans l’histoire. Et pourtant elle revenait à chaque fois, donnant vie aux mots qui la torturaient.
 
Elle était de retour de la ville. Elle était heureuse. Son monde avait une nouvelle fois réussi le passage vers la lumière. Les ombres autour d’elle chuchotaient et commençaient déjà à préparer le corridor sombre qui l’amènerait dans la chambre d’ou partaient ses pensées. Ils avaient hâte de lui montrer la suite, de la laisser l’améliorer, l’assombrir puis de la faire vivre.
 
Lorsqu’elle prit la torche accrochée au mur elle sourit tristement, repensant à ce que lui avaient dit les gens. Puis elle entra, non sans avoir touché les lettres gravées dans le bois de la vieille porte: