Je m’éveille lentement, tiré de mon sommeil par la disparition soudaine de ma couette qui me tenait bon chaud au dessus de moi. Je gémis silencieusement et j’essaie d’ouvrir les yeux, mais je suis tellement fatigué que mes paupières m’envoient balader en restant collées contre mes cils. Je sens des mains délicates soulever mon corps et m’emballer dans ce que j’imagine être une couverture. Elle est toute douce. On dirait presque celle qu’Alde prend toujours lorsqu’on regarde des films sur le canapé, le soir... Un bras se glisse dans mon dos et un autre passe sous mes genoux. Je sens qu’on me porte. Je grogne un peu pour manifester mon mécontentement mais je me retrouve bien vite plaqué contre quelque chose de tiède, à l’odeur vraiment agréable. J’enfouis ma tête contre le torse d’Alderiate avant de demander d’une voix pâteuse.
- Alde, qu’est-ce que tu fais ?
- Shhht, c’est rien Chap, rendors-toi...
Comme je suis un brave petit soldat, je lui obéis sans poser de questions.
**
Aïe !
Je viens de me cogner violemment la tête contre un mur, ce qui a eu pour effet de me faire brutalement revenir à la réalité.
- Désolé... grogne doucement la voix d’Alderiate à ma droite.
Je mets quelques secondes à reprendre mes esprits clairement, le cerveau embrumé par la fatigue. Je suis assis sur un siège, la tête appuyé contre quelque chose de dur. Un vrombissement régulier m’intrigue alors que je sens mon corps partir légèrement vers la gauche. J’ouvre un œil, puis l’autre et je vois un paysage campagnard défiler rapidement sous mes yeux. Je croise mon propre regard dans le rétroviseur. J’ai vraiment une tête d’endormi. Je prends mon courage à deux mains et je me redresse pour aller appuyer ma tête contre le dossier de mon siège et m’étirer légèrement. Je me tourne vers Alderiate qui conduit la voiture dans laquelle je me trouve, l’air concentré.
- Alde... Mais qu’est-ce qu’on fout là ? l’interroge-je d’une voix légèrement rauque.
Il abandonne quelques secondes la route des yeux pour se tourner vers moi, avec un grand sourire.
- Coucou, Chap ! T’as faim ?
Son regard retourne à la circulation alors qu’il tâte distraitement la portière de son côté avant de me tendre un paquet en papier. Je le prends, intrigué avant de l’ouvrir, alléché par la douce odeur qui s’en dégage. Je hocha la tête, pensif.
- C’est pas des croissants anglais, hein ?
- Perspicace ! Non, ils sont français. Je les ai acheté sur une aire d’autoroute après qu’on ait passé la frontière !
- Et tu peux m’expliquer ce qu’on fait en France ?
Il ne dit rien, mais je peux voir de profil un sourire énigmatique se dessiner sur ses lèvres. Je soupire et j’attrape un croissant encore tiède avant de commencer à le manger en essayant de ne pas mettre des miettes partout. Pendant que je le déguste, mes yeux se perdent dans les paysages et je réfléchis à toute pompe. Une fois mon petit-déjeuner fini, je me frotte les mains et j’expire bruyamment.
- Bon. Tu es venu m’enlever pendant la nuit pour m’emmener en France. Qu’est-ce que tu as derrière la tête ?
- Tu verras !
Je resserre ma couverture autour de moi. Il est crispant.
- Et tu nous as fait remplacer pour aujourd’hui ?
- Oh, mince ! me dit-il ironiquement, comme si la réponse était évidente.
Je boude un peu.
- Qui t’as dit que j’avais envie de revenir en France...
- Chut.
- Mais Alde...
- Chut.
Mon cerveau marche à toutes pompes. Qu’est-ce qu’on fait là ? Je vois des pancartes défiler sous mes yeux, des noms de villes que je ne connais pas.
- Et du coup, on s’arrête où ?
- Tu verras.
- Alde !
- Dans environ deux heures, on y est.
J’en ai presque mal à la tête. Je viens de me faire enlever durant la nuit par mon petit ami. Il m’a ramener en France et il m’emmène dans un endroit inconnu. Pourquoi ? Je n’arrive pas à le déterminer. Tout à coup, une idée me traverse l’esprit. Je me mets à angoisser.
- Alde... On va pas aller voir tes parents quand même ?
Il éclate de rire.
- Non ! Non, je te rassure, on ne va pas chez moi.
Un moment de silence s’en suit.
- On va chez moi alors ?
- Arrête de poser des questions, Chap. Tu as froid ?
Je grogne de frustration. Je suis vraiment trop curieux. Je ne réponds pas à sa question.
- Si jamais, tu as un bas de training sur le siège arrière. Tu peux prendre ma veste aussi. Tu te changeras quand on arrivera à l’hôtel.
Bam. Il vient de me lâcher une info importante. On va à l’hôtel ? Mais qu’est-ce qu’on va faire dans un hôtel ? Je m’imagine tout pleins de scénarios dans ma tête, sans réussir à déterminer quel est le plus plausible.
**
- Euhm... Chap ? me demande la voix légèrement hésitante d’Alderiate.
J’ai enfin réussi à me changer dans cette maudite voiture. C’est vraiment la galère de faire ça. J’ai balancé la couverture à l’arrière et je me suis étiré dans tous les sens. Alderiate m’a proposé qu’on fasse une halte mais j’ai refusé. Je suis trop curieux, je veux qu’on arrive vite.
- Oui ? réponds-je.
- Tu... ne voulais vraiment pas revenir en France ?
Je souris.
- Avec toi, j’irais n’importe où. Et puis, t’aurais pu m’amener en Syrie, aussi.
Il rit de bon cœur. J’ai vu son regard dévier sur moi. Ma remarque l’a touché.
- J’y penserai pour la prochaine fois. On devrait aller visiter une culture de manioc, un de ces jours...
La discussion se met à dévier dans tout un tas de sujets différents. Je ne vois pas le temps passer et Alderiate finit par bifurquer sur le parking d’un hôtel. Je connais cet endroit. On est dans ma ville d’origine.
Il coupe le contact et sort de la voiture. Il embarque deux sacs qu’il avait cachés dans le coffre et vient m’ouvrir la portière galamment. Je lui souris, un peu déboussolé, et il m’entraîne vers l’entrée de l’hôtel. Je rougis un peu. Je suis habillé comme un vrai plouc, mais personne ne semble y faire attention. Je me laisse embarquer par Alderiate et on finit dans une chambre à deux places, dans des teintes grisâtres. Ce n’est pas le plus grand des luxes, mais c’est mignon. Mon petit ami m’a passé le sac qui contient mes affaires. Je l’ai inspecté minutieusement. De quoi me doucher, me changer, dormir... Rien qui ne me donne d’indication sur la raison de notre présence ici. Je commence sérieusement à me poser des questions. Je me tourne Alde, qui s’est affalé sur le lit comme une grosse baleine et je lui demande :
- Alde, tu m’expliques ce qu’on fout là ?
- Tu te douches, je t’explique.
Je lui lance un regard indigné.
- Dis tout de suite que je pue !
- Tu pues.
Je me vexe pour de faux et je pars en direction de la salle de bain, feignant l’énervement. Très vite, j’entends des bruits de pas derrière moi et des bras viennent s’enrouler autour de ma taille. Je sens son nez dans mon cou et je frissonne légèrement.
- Je rigole, tu le sais bien... Et puis, laisse-moi faire durer le suspense encore un peu... souffle-t-il sur ma peau.
Je m’appuie un peu contre lui, profitant d’être dans ses bras. Il me fait me retourner et m’embrasse avec douceur, joignant ses mains aux miennes. Je joue avec ses doigts quelques secondes et puis on se détache l’un de l’autre. Il me regarde, malicieux.
- T’as besoin d’aide pour ta douche ?
Je rougis violemment. Je sais qu’on est ensemble depuis assez longtemps, mais je suis toujours un peu gêné quand il me propose ce genre de chose. Il m’ébouriffe un peu les cheveux en se moquant de ma réaction.
- Allez, je te laisse.
Il sort et j’entends un gros grincement dans la pièce d’à côté, signe qu’il s’est affalé sur le lit. Je souris et je ferme la porte qu’il a laissée ouverte, avant de me préparer pour aller me laver.
**
- Alde ! J’ai fin...
Je m’interromps brusquement. Je viens de sortir de la salle de bain et j’ai entendu les légers ronflements d’Alderiate. Il s’est endormi sur le lit, comme une masse. Je le regarde tendrement. C’est vrai qu’il a conduit toute la journée, le pauvre. Je vais m’asseoir près de lui. J’hésite à le réveiller... En même temps, j’ai peur que ce qu’il a prévu nécessite du temps, mais il a l’air de dormir tellement bien... Je me mords un peu la lèvre et je le brasse doucement, en appelant son prénom. Il sursaute et ouvre les yeux, un peu perdu.
- Merde, je me suis endormi ? me dit-il en se redressant.
- Oui, mais pas longtemps... Alors, tu me dis ce qu’on fait là ?
Je ne perds pas le nord. Je veux vraiment savoir. Il se lève et vient s’asseoir à côté de moi.
- T’es sûre que tu ne veux pas attendre ce soir ? me provoque-t-il, enjoué.
- Certain ! Si tu ne me dis pas ce qu’on fait là, j’appelle la police et je dis que je me suis fait enlever.
Il aborde une petite moue amusée, avant de prendre mes mains dans les siennes. Je le vois baisser un peu les yeux. Il inspire profondément.
- Bon, écoute. Comme j’ai... oublié -il grimace- ton anniversaire, on ne l’a pas fêté en Angleterre. Alors je me suis dit, pourquoi ne pas rentrer en France le fêter avec tes amis de France...
J’ouvre grand les yeux. Il a...
- J’ai un peu galérer, il faut dire que tes amis m’ont pas mal aidé. Vraiment des gens chouettes. Ils ont géré pas mal de trucs... Et...
Je ne le laisse pas finir. Je lui saute dans les bras et je l’enlace de toute mes forces. Il me serre contre lui affectueusement.
- Je suis désolé d’avoir oublié ton anniversaire, Chap...
Je m’en fiche qu’il l’ait oublié. Je m’en fiche tellement. Il m’a organisé une fête avec tous mes amis de France qui me manquaient horriblement. Je l’aime. Oh, je l’aime tellement. Notre étreinte se prolonge alors que je le remercie inlassablement, sans tenir compte de ses « tu me remercieras après... » gênés. Je suis tellement content. On finit par se séparer. Je dois avoir des étoiles dans les yeux. Il me sourit.
- Qu’est-ce que tu veux faire cet après-midi ? On a du temps devant nous, la fête est ce soir et on a rien à préparer. Si tu veux, on peut aller voir ta famille demain, aussi...
Je tressaille un peu à cette idée. Présenter Alderiate à mes parents et à ma sœur ? J’angoisse un peu, mais l’idée me plaît. Et puis, ils l’aimeront sûrement. C’est un ange.
Là, Je vois bien les cernes sous ses yeux. Il m’a l’air fatigué. Je pense qu’on va adapter le programme pour le reste de la journée.
- Si tu veux pour cet après-midi, on peut rester là... Tout les deux ?
- Sûr ? On est en France, on pourrait en profiter... ?
Il est vraiment adorable. Il serait prêt à oublier sa fatigue pour moi. Je me couche dans le lit et je tapote la place près de moi pour qu’il vienne s’y installer. Il hoche la tête et me rejoint. J’attrape la télécommande sur ma table de nuit et j’allume la télévision.
- On doit y être à quelle heure, ce soir ? je demande.
- 18h. Il me répond simplement.
- Je te réveille à 17h ?
Il me lance un regard reconnaissant et acquiesce. Il prend ma main dans les siennes et se roule en boule. Il joue avec mes doigts quelques minutes et finit par s’endormir comme une bûche. Je me concentre sur l’émission de cuisine qui passe à l’écran, avant de zapper en me rendant compte que je déteste ça. J’hésite à mettre la trente quatre, juste pour rire, mais je ne le fais pas. Sans Alderiate pour commenter avec moi, ça n’aurait pas la même saveur. Je passe mon après-midi à m’abrutir avec des programmes pour sans-cervelle, les mains d’Alderiate doucement pressées contre la mienne. A chaque fois que mon regard se pose sur lui, je souris bêtement.
Il n’y a que lui pour organiser des trucs pareils...
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Ouaaaaah ! Il ne m'en reste plus qu'un !
Je pense que je vais être triste en finissant cet OTP, quand même :/
Enfin, quoi qu'il en soit, j'espère que vous avez aimé !
Je vous avoue que j'ai modifié quelques trucs pour que ce soit plausible. Genre la date d'anniversaire de Chap est normalement le 01.01 et sa ville de naissance c'est Paris. Du coup, j'ai un peu arrangé ça pour que ça passe, j'en suis désolée !
Merci d'avoir lu !
Flo'