Je me réveillais aux premières lueurs du jour dans un lit deux places, vêtu seulement d’un caleçon, avec une horrible gueule de bois. Anthox arriva avec un verre d’eau et un antidouleurs quelques secondes plus tard.
-Ah, déjà réveillé ? s’étonna-t-il. Tiens.
-Merci, murmurais-je, la voix un peu cassée.
J’avalais le cachet et pris une gorgée d’eau pour l’avaler. Je terminais ensuite le verre. Mon ami s’assit à côté de moi.
-Pas trop mal au crâne ? demanda-t-il, visiblement inquiet.
-Ça va… lui répondis-je.
-Bien !
Il se leva et me fit face, souriant.
-Pourquoi je suis en caleçon dans une chambre qui n’est évidemment pas celle que j’ai occupé la nuit où j’ai dormi chez toi ?
Il semblait un peu gêné. Il se rassit, fixant le sol. J’espérais au plus profond de moi qu’il n’ait pas profité de moi et de mon état… J’espérais tellement bien que la dernière image que j’avais de lui la nuit dernière fut un grand rapprochement physique…
-Hé bien… T’étais vraiment salement amoché, commença-t-il en se grattant la tête. Alors je t’ai soulevé du canapé pour monter dans la salle de bain et j’t’ai fait prendre une douche glacée. Je me suis dit que ça t’aiderait à dormir et à avoir moins mal à la tête le lendemain. Je t’ai déshabillé parce que c’est les seuls vêtements que tu as ici mais pas entièrement, ne t’en fais pas. Ensuite, après la douche, je t’ai amené dans ma chambre car c’était la plus proche et j’ai dormi dans l’autre.
Je soupirai de soulagement et le remerciai pour ce qu’il avait fait avant de me rhabiller rapidement – il avait posé mes affaires sur la malle en face du lit – et de le rejoindre au rez-de-chaussée. Il buvait tranquillement un café à table. Je m’assis en face de lui.
-Tu veux du café ? me proposa-t-il.
J’acquiesçais et il me servit. Je pris la tasse devant moi et commença à boire.
-J’aimerais beaucoup que tu m’éclaires au sujet des policiers d’hier, fis-je peu après en posant ma tasse.
-C’est des flics du district B, les seuls qu’on craint.
-District B ?
-Il y a plusieurs district, m’expliqua l’homme en face de moi. Les tours que tu vois au loin font du district Business appelé district B, nous sommes le district C, district criminel, et plus au nord, tu peux voir des villas et des manoirs. District A, aisé, ou abrutis comme on l’appelle ici. Les flics du district B n’hésitent pas à tirer sur tous les criminels qu’ils voient s’ils peuvent plaider légitime défense. Si on se fait attraper, on ne revient jamais. J’ai une connaissance qui en est revenu salement blessé, il est mort le lendemain. Il m’a dit qu’on l’avait torturé pour obtenir des informations et jeté en voyant qu’il ne dirait rien…
J’étais choqué. Des policiers ? Mais comment, pourquoi ?
-De quoi est décédé ta connaissance ? demandais-je finalement.
-De ses blessures. Il avait une hémorragie interne que j’avais réussi à modérer et une côte brisée qui faisait appui sur son cœur. Il ne pouvait plus bouger…
-Vraiment ? Wow…
Je frissonnai d’effroi en imaginant ce qu’il se passerait si je tombais entre leurs griffes.
Ce jour-là, Anthox avait décidé de me faire visiter un peu le quartier. Je le suivais donc dans les rues étriquées et peuplées. Nous arrivions dans une rue vraiment bondée. Mon guide attrapa mon poignet fortement et me tira dans la foule.
-Fais bien attention aux pickpockets… me mit-il en garde.
Je hochais la tête et me laissais guider jusqu’à ce qu’il bifurque dans une rue vide, contrastant tellement avec celle que nous venions de traverser. Nous nous enfonçâmes alors jusqu’aux bords de la ville.
C’était stupéfiant, la terre laissait place à l’herbe verte et les maisons s’arrêtaient net, leurs façades rongées par le lierre. Quelques petits arbres poussaient au devant et leurs ancêtres les surplombaient derrière majestueusement. La débauche, la pauvreté et la saleté du district C s’effaçait si soudainement face à la magnificence, la grandeur et la force de la nature sauvage, dense.
-Woa ! m’exclamais-je d’admiration en m’avançant doucement, contemplant la verdure.
J’entendis à peine le rire d’Anthox derrière moi. Après quelques minutes de silence, je me tournai vers mon ami.
-Comment ça se fait qu’il y ait ça à côté d’un quartier comme ça.
Je montrai successivement la forêt et la ville.
-Je sais pas… sourit Anthox. Bon, on devrait pas s’éterniser ici. En plus, la nuit va bientôt tomber.
J’allai repartir quand je sentis quelque chose contre ma jambe. Je baissais la tête et vis un petit rat blanc sûrement domestique avec une tâche grise autour de l’œil droit et d’autres encore un peu partout sur le corps. Je me baissais et voulut l’attraper mais il se recula, me craignant sûrement. J’insistai et passa le bout de mon doigt sur sa tête. Il se laissa faire et je pus le prendre.
-Salut toi, murmurais-je à l’animal.
Je le caressais de mon index. Il était si petit ! Ah, petite. C’était une femelle. Anthox se pencha au dessus de mon épaule pour voir ce que je faisais. Il sourit en voyant la rate et se redressa.
-Y’en a un autre qui arrive, regarde, me dit-il.
Je relevais la tête pour croiser le regard d’un petit rat semblable. Je remarquai qu’il avait, lui, une tâche autour de l’œil gauche. Je le pris également et remarquai que c’était aussi une femelle. Elle me grimpèrent chacune sur un bras pour se poser sur mes épaules. Je les rattrapais avant qu’elles ne se glissèrent sous mon haut puis me relevais.
-On peut y aller ! fis-je, tout joyeux.
-Tu les prends ? questionna le criminel devant moi avec un sourire amusé.
-Bah ouais, elles sont mignonnes !
-Elles ? s’étonna-t-il.
-C’est des femelles.
-D’accord… Bon, on y va.
Il tourna les talons et retourna dans la ville. Je le suivis de près, tenant mes rates pour ne pas qu’elles s’échappent ou qu’elles ne se fassent voler.
Arrivé à la maison, je posais mes deux nouveaux animaux de compagnie sur la table du salon. Ils me regardèrent un instant, le museau levé, avant de regarder autour. La rate avec la tâche à l’œil droit descendit du meuble et je parvins à l’attraper avant qu’elle n’atteigne le poste de télévision. Je la reposais sur la table et fixais les deux animaux.
-Il faut que je trouve un nom… me dis-je à voix haute.
Je relevais la tête et, quelques minutes plus tard, lorsque je la baissais, je remarquais que l’une était repartie vers le poste et l’autre gambadait tranquillement. Je récupérais la première.
-Tu ne toucheras pas à un seul pixel de cette télévision ! dis-je.
Je m’approchais de l’autre quand je m’aperçus qu’Anthox la tenait déjà et me la tendait.
-Tiens, évite de laisser traîner tes peluches, j’ai failli marcher dessus, remarqua-t-il.
-Merci… T’aurais pas une idée de nom ? le questionnais-je.
-Mmh… réfléchit-il. Razmotte ?
-Razmotte ? m’étonnais-je.
-Ouais… Ça lui irait bien, fit-il avec un geste de tête en direction de la rate qu’il a failli piétiner.
-Ok, donc tu vas t’appeler Razmotte, dis-je à la rate qui a la tâche sur le côté gauche de son visage. Il reste plus qu’à trouver un nom.
Je réfléchissais quand une illumination me vint, la phrase que j’avais prononcé en récupérant l’autre rate !
-Ce sera Pixelle ! m’écriais-je.
Le rire de mon comparse me répondit.
-Quoi ?
-Tu ressembles à un gosse à Noël…
-Ah ?
-Ouais… c’est mignon, continua-t-il de rire.
Je déposai Pixelle sur mon épaule gauche et Razmotte sur l’autre.
-Je pense que je vais rentrer chez moi, dis-je en me tournant vers Anthox.
-À plus ! me sourit-il.
Je restai un moment à le fixer, comme perdu dans mes pensées.
-Alexis ? appela-t-il.
-Hum, oui, pardon. À plus !
Je partis de la maison en affichant un sourire gêné.
Rentré chez moi, je m’affaissais de toute ma hauteur sur mon lit, posant mes rates à côté de moi. Mon regard alla se fixer sur le plafond dont la tapisserie passée de mode tombait en lambeaux. Je me mis à penser… Je pensais à Anthox et à notre merveilleuse rencontre. Et à l’homme magnifique qu’il était… Puis surtout, à sa personnalité extravagante qui m’attirait tant depuis un moment déjà. Un souvenir me revint en mémoire : nous étions en train de nous regarder, droit dans les yeux. Tant de pensées m’avaient envahi à ce moment là… Ses yeux étaient si perçants… Ils brillaient d’une lueur d’extravagance et de joie que je n’arrivais pas à ignorer depuis la première fois que je les avais croisés. Il me dévisageait avec une certaine douceur, de l’affection et un peu de fascination, je pense également. Une dernière chose dans son regard pouvait me lettre dans tous mes états : un éclat de bienveillance. Bizarre de la part d’un criminel… Je devais être bien privilégié pour qu’il me regardait ainsi. Je repensais à la veille, le sourire d’Anthox après m’avoir sauvé pendant le duel et cette étrange sensation de contact lors de la nuit précédente, mais celle-ci n’était pas pour me déplaire finalement, loin de là. Comme si j’avais toujours attendu ce contact, cette proximité, depuis notre première rencontre. Peut-être qu’Anthox était un peu plus que mon employeur. Un peu plus que mon ami. Peut-être qu’Anthox avait ce ‘’un peu plus’’ qui faisait battre mon cœur en plus du sang dans mes tempes.
Les jours défilèrent, puis les mois. Nous nous voyions souvent avec Anthox Colaboy. Nous planifiâmes ensemble un braquage dans le district B et nous nous préparions en conséquence. L’échéance de nos préparatifs se rapprochaient à grands pas jusqu’à ce que le jour fatidique arrive enfin.
Je m’étais rendu, le soir, chez mon ami et le saluais. Nous nous dépêchâmes d’enfiler nos tenues et de prendre nos outils, armes et sacs avant de nous rendre à pied à la banque. À une heure aussi avancée de la nuit, il n’y avait personne à part quelques gardes. Deux à l’entrée, trois qui faisaient des rondes à l’accueil, deux encore aux portes du couloir et cinq devant la porte du bunker où se trouvaient les biens. Nous connaissions le plan par cœur.
En même temps, Anthox et moi-même maîtrisions les deux gardes de l’entrée avant que je me mette à percer la vitre tout à droite. Mon compagnon m’imitait en face de moi. Il tira sur le garde du milieu avec son silencieux et se rua sur le deuxième. Moi, j’attaquais le troisième et le mis rapidement à terre grâce à la surprise. Je le neutralisai et rejoignis mon ami pour tuer les deux autres devant la porte du couloir. Il ne restait plus que le plus dur et la partie la plus intéressante. L’alerte n’était pas encore donnée mais ça ne saurait tarder. Nous prîmes chacun une grande respiration et passâmes la porte. Je tirais sur une premier gorille par dessus l’épaule d’Anthox, le tuant, et donnais un coup de pied à un autre alors que mon acolyte envoyait la crosse de son arme de poing dans la nuque d’une énième garde. L’alerte était donnée, j’avais vu le garde le plus proche de la porte appuyer sur le bouton rouge pour prévenir les flics. Je lui tirais immédiatement dessus et il tomba sur le dos. Nous nous occupâmes rapidement des deux gardes qui restaient avant de nous approcher de la porte des coffres de la Banque.
Je faisais le guet pendant que mon acolyte ouvrait la porte. Nous entrâmes ensuite en remplissant les sacs et sortîmes rapidement. Il ne fallait pas s’éterniser, le risque de se faire choper grandissait vite.
À la sortie, des flics nous attendaient. Nous passâmes le plus furtivement possible sur le côté quand vint le moment de se mettre à découvert.
-Trois… deux… un… décompta Anthox. Zéro !
Nous courûmes le plus rapidement possible jusque la rangée de maison en face mais j’étais moins rapide que mon ami. Il le vit et rebroussa chemin. Une fois devant moi, il tourna la tête, passa un bras autour de ma taille et m’attira à lui. Une balle siffla près de mon oreille.
-Cours !
J’obéis et passais devant lui alors qu’il tirait sur les flics. Il me retrouva ensuite pour que nous puissions nous engager dans les ruelles. C’était un véritable labyrinthe, parfait pour semer les policiers. Quand nous en croisions, nous le tuions à vue. Guidé par Anthox, nous nous retrouvâmes dans un cul-de-sac. Il commença à grimper à une échelle rouillée et je le suivis immédiatement. Nous continuâmes notre fuite sur les toits pour rentrer à la maison.
Arrivés là-bas, nous nous affalâmes en sueur et essoufflé sur le canapé. Au bout de quelques minutes de silence, Anthox se leva et partit. Il revint un peu plus tard avec une bouteille de whisky et deux larges verres. Il les remplit et m’en donna un.
-À cette réussite ! s’exclama-t-il, souriant.
-À notre réussite ! fis-je, souriant aussi.
Nous bûmes d’une traite notre premier verre, les enchaînant ensuite. J’étais torché et lui aussi mais nous étions encore relativement lucide. Je crois…
Je ne me souvenais pas, une nouvelle fois, de ce qu’il s’était passé. Et encore une fois, je me réveillais dans son lit. Mais avec quelques détails en plus… J’étais nu et il était encore endormi à mes côtés, certainement aussi dénudé que moi. Je m’étais redressé mais me laissai rapidement retomber dans le lit. Je n’osais pas tourner la tête vers Anthox… Alors je contemplais le plafond qui devint la chose la plus intéressante au monde. Et la douleur vint comme ça, mais ce n’était pas un mal de tête, c’était bien plus bas… Je soupirai. Bordel ! On l’avait fait… Je fermais les yeux en me tenant la tête et des flashs me revinrent, me faisant presque rougir de gêne. Je rouvris soudainement les yeux en sentant un bras enlacer mon ventre et me serrais par réflexe. C’était le sien, celui d’Anthox. Je me crispai soudainement et le fixai. Il était réveillé et me regardait également. Il retira sa main et émergea complètement. Il releva la tête vers moi, souriant toujours, et vint m’embrasser presque avec empressement, spontanément, comme pris d’une impulsion. Et je souris également sous toutes les sensations qui m’envahirent, lui rendant finalement. Ma main droite vint se poser d’un geste machinal sur sa nuque et la gauche se cala au bas de son dos.
Je ne comprenais plus ce qu’il m’arrivait et je crus bien que c’était comme ça depuis notre rencontre au bar. Ça faisait un peu plus d’un an qu’on se connaissait… et un peu moins d’un an que je l’aimais je pense. Je ne me souciais pas vraiment de mes sentiments, enfin je faisais du mieux que je pouvais, pour profiter de nos moments ensembles. Mais je me demandais pourquoi, maintenant. C’était tellement bon, l’embrasser, caresser sa peau, le serrer contre moi… C’était un peu un rêve interdit.
Nos lèvres se mouvaient en rythme dans le baiser avant qu’il ne soit rompu par Anthox qui se releva en s’habillant. Mon regard se posa sur un horrible objet noir… avec des poils ?
-Heu… Anthox, c’est quoi ça ? demandais-je en montrant le machin d’un signe de tête.
-Oh, ça, c’est Biscotte, me répondit-il.
Je m’approchai alors de cette chose, oubliant ma nudité. C’était un chat… empaillé…
-C’est… moche… fis-je en me détournant pour enfiler mes vêtements.
Je vis mon amant hausser les épaules dans l’encadrement de porte puis disparaître pour descendre les escaliers. Je le suivis.
Nous avions pris le petit déjeuner et étions encore à table quand des interrogations vinrent me tarauder.
-Anthox ? appelais-je.
-Mmh ?
-Pourquoi tu m’as parlé, au bar ?
-Avoir un peu de compagnie, ça fait pas de mal. C’était un peu pour ça que tu y étais allé, non ? Parce que tu aurais très bien pu te saouler chez toi, seul…
-C’est vrai… Mais pourquoi moi ?
-Parce que tu me plaisais, sourit-il en s’appuyant à son dossier et s’allumant une clope. Mais au fait, tu ne devrais pas rentrer chez toi ? Pixelle et Razmotte vont t’attendre…
Je souris.
-T’as raison… À demain ?
-Allez, à demain.
Je me levais, rassemblais mes affaires et partis prestement. Un sourire restait collé à mon visage alors que je marchais dans les rues.
Je rentrais enfin et mes deux rates vinrent à la porte de la cage. Je posais ma veste et tout ce qui m’encombrait avant de les sortir, chacune dans une main. Je les caressais de mon pouce en veillant à ne pas les blesser. Elles remontèrent d’elles-mêmes, bien qu’un peu hésitantes, jusqu’à mes épaules.
Ce que j’aimais les animaux… Je me demandais comment certains faisaient pour les abandonner… Ils sont si mignons, si… inoffensifs ? Enfin, tant qu’on ne les embêtaient pas. Si ma situation financière le permettait, mon appartement aurait put devenir un zoo car j’aurais recueilli tous les animaux abandonnés du quartier mais il était évident que je n’en avais pas les moyens… Je regardais mes petites rates évoluer sur le haut de mon cœur, tantôt regardant vers mon visage, tantôt essayant de descendre le long de mon torse, comme des petits enfants qui découvriraient le monde. C’était exactement ça, après tout. De jeunes créatures qui découvraient leur environnement. C’était attendrissant…
J’allais ensuite travailler sur la dernière commande du groupe dont je suis le compositeur, nullement gêné par les déplacements de mes petits rongeurs.
Le lendemain, je me rendis chez Anthox et eus la surprise de le voir devant chez lui, son éternel borsalino sur la tête et couvert de sa veste. Il s’avança vers moi et m’embrassa doucement. Je n’étais pas encore vraiment habitué à ces contacts plus que plaisants… Il me regarda en souriant.
-J’aimerais te montrer la ville entière et ses cinq districts. Il me semble que tu n’as pas visité grand-chose…
-Effectivement, souris-je.
Il passa devant moi en attrapant ma main.
-Suis-moi !
Et je le suivis alors. Nous marchâmes sur la grand route jusqu’au district A.
Les maisons étaient, pour la plupart, en marbre blanc et saumon, avec des arches. Imposantes, les arches supportaient un balcon ou la toiture. La décoration extérieure était raffinée, semblable à celle des villas du sud du pays. Une maison – ou plutôt un manoir – attira plus particulièrement mon attention. Il dépassait de deux mètres au moins les autres toits et paraissaient plus ancien et de construction nordiste. Les briques rouges foncées rongées par la mousse étaient trouées de fenêtres aux bords blancs et le toit d’ardoise résistait au temps comme il le pouvait. Le manoir semblait laissé à l’abandon, envahi par les plantes et les animaux en tout genre... Je passais finalement à autre chose quand même yeux se posèrent sur une magnifique villa en grès blanc. Une arche servait de porche et une moustiquaire de porte. Le toit était étrangement bleu mais s’accordait tout de même parfaitement avec l’ensemble de la propriété.
Ma main serra plus celle de celui que je pouvais maintenant appeler mon petit ami quand je sentis la foule m’emporter. Nous continuâmes notre route entre les grands jardins fleuris avec piscine et les jolies villas d’un style bien différent du district C puis arrivâmes finalement au district E. Je demandais la signification à mon guide.
-Le district E, c’est le quartier des Élites, y’a tous les scientifiques, les philosophes, les mathématiciens… m’expliqua-t-il.
Et ça se voyait… Les rues étaient vides, les stores des baraques baissés. Il n’y avait rien de spécial, les maisons étaient toutes les mêmes quasiment… C’en était presque désespérant.
Le district suivant était le D et je n’eus aucun mal à reconnaître le quartier des créatifs, des artistes ou plutôt des Doués de l’art – il n’y avait pas de mots uniques les qualifiants. La grand-route était coupée par une place aux pavés colorés comme des mosaïques et aux buissons taillés avec un grand talent, représentant des chevaux tournés vers la fontaine au centre de la place. Elle était en quartz et marbre, originale et classieuse à la fois. Quatre poissons projetaient de petits jets d’eau vers le pilier principal qui crachait sans cesse son liquide translucide. Les courbes étaient harmonieuses et représentaient une femme nue tenant au dessus de sa tête un coquillage d’où sortait l’eau. Les maisons étaient tordues, sculptées brut dans la pierre, peinte, et plus qu’originales. Certaines avaient même la façade ruisselante d’eau ou encore des sculpture 3D surgissant du mur. Elles étaient petites, collées, étriquées, et pourtant, le génie créatif de ces gens parvenait à s’exprimer dans toute sa grandeur… C’était un endroit magique, déconnecté, où le dessin, la peinture, la sculpture, le collage, la photographie, le théâtre, la musique et absolument toutes les formes d’art – même la cuisine ! – se rejoignaient, s’harmonisaient et s’imbriquaient à la perfection. Je fus enchanté par la beauté simpliste et avant-gardiste de ce district.
Vint ensuite le district B, au centre. Tout était maussade, transpirant l’angoisse et le stresse. Tout le monde courait dans tous les sens, les yeux rivés sur leur montre ou leur téléphone, ce qui me rappelait que je n’avais pas touché depuis un moment au mien… Les hautes tours de verre et d’acier étaient oppressantes… On ne pouvait voir le ciel à cause d’elles et elles se refermaient sur nous comme des dents mécaniques. Aussi, je fus soulagé quand nous bifurquâmes de nouveau vers le district D pour manger.
Le restaurant qu’Anthox avait choisi était tout bonnement magnifique. La plafond bas en plâtre blanc laissait ressortir les poutres apparentes. Me baisser pour passer ne me gênait aucunement. Mon compagnon, lui, n’en avait pas besoin. Les murs étaient colorés de fresques qui explosaient à la figure de celui qui les regardait à grand coup de palette, de personnages et décors créatifs et d’arc-en-ciel. Nous nous assîmes à une table pour deux en bois sombre avec deux chaises dépareillées et que je reconnus comme artisanales. Il y avait déjà les cartes et nous commandâmes rapidement.
Le déjeuner se passa très bien. Je trouvais la nourriture appétissante et excellente et le cadre était superbe. Nous avions discuté, Anthox et moi, durant tout le repas et avions quitté le restaurant avec le sourire. Nous rentrâmes ensuite chez lui car il commençait à avoir de l’orage…
Je venais à peine de rentrer quand je sentis une main saisir mon poignet et me projeter contre la porte fermée. Anthox me maintenait contre avec une étrange force et me fixait de ses yeux noirs de désir, me faisant frissonner et sourire à la fois.
-Monsieur est un rapide, mh ?
Il m’embrassa sauvagement pour toute réponse et ça me convenait. Ses mains s’accrochèrent à mes hanches et son cou s’étira pour que je n’aie pas à trop baisser le mien. Je le poussais doucement vers les escaliers et nous les montâmes tout en nous embrassant. Il me poussa dans sa chambre, referma la porte et m’allongea sur le lit encore défait.
- LEMON:
Il enleva son veston noir avant de s’affairer à retirer mon t-shirt. Il arrêta tout baiser pour s’asseoir sur mon bassin. Je le regardai déboutonner lentement sa chemise tandis que son regard de braise me dévorait. Un frisson me parcourut de nouveau quand son torse se découvrit. Mon amant me vola un baiser puis retira habilement son jean.
Les lèvres d’Anthox découvraient – ou plutôt redécouvraient – mon torse dénudé avec une douceur que je n’aurai jamais soupçonnée. Je fermais les yeux en lâchant quelques gémissements de temps à autre. Ses baisers sur ma peau me procuraient des sensations inattendues : c’était comme une flamme crépitante mais volatile qui se baladait et s’amusait à me brûler l’épiderme. Il arriva à mon bassin et défit rapidement la fermeture de mon pantalon. Il me le baissa doucement, prenant bien le temps de me caresser en m’effleurant à peine, par sadisme certainement. Il se redressa pour capturer mes lèvres dans un baiser passionné. Sa main, elle, descendit le long de mon corps presque entièrement nu et passa sous mon caleçon pour masser mon membre déjà durci par nos préliminaires. Je gémis encore une fois en basculant la tête en arrière. Ses caresses brûlantes me donnaient une sensation d’étrange bien-être et… comme si des ailes de papillons battaient dans mon ventre. C’était tellement agréable, presque trop. Je me sentais si bien dans ses bras, j'avais le sentiment de lui appartenir comme il m’appartenait. Et cette tendresse… cette tendresse que je n’aurais jamais cru voir dans ses yeux, dans ses gestes… Je me mordis la lèvre sous le plaisir et la joie qu’il me procurait.
Ce fut à ce moment là qu’Anthox me retira mon dernier vêtement rapidement suivi du sien. Nous étions nu et nos peaux glissaient, se cherchaient et se trouvaient pour causer une brûlure ardente dans tout mon corps. Nos jambes s’enlaçaient comme nos bras le faisaient. Je caressais son torse meurtri par les coups qu’ils s’étaient pris et les blessures qui lui ont été infligées depuis de nombreuses années. Il frémit. Ma main remonta au niveau de son oreille pour effleurer doucement l’éraflure de la balle. À chaque déplacements de ma main, il frissonnait. Ses yeux remplis d’envie et d’amour me dévisageaient avec un sourire énigmatique que je connaissais si bien pour l’avoir observé de nombreuses fois sur ses lèvres.
Mon amant prit l’initiative de me préparer. Je grimaçai au début mais finis par me détendre rapidement – et heureusement car je croyais bien qu’il n’aurait pas attendu que je sois prêt –, mon front contre son épaule et mes mains s’accrochant à son dos ou ses bras, se crispant à chaque fois que je ressentais de la douleur ou du plaisir. Il finit par retirer ses doigts de mon intimité et fit alors passer mes jambes de chaque côté de son bassin avant de me pénétrer d’un coup sec. Je me mordis violemment la lèvre alors qu’il souriait et me regardait avec appétit. Nos yeux se trouvèrent et ne se quittèrent pas jusqu’à ce qu’il commence les vas-et-viens. Pris alors d’un spasme violent sous la puissante sensation qui m’envahit, je me courbai en gémissant, les yeux fermés. Tout ce plaisir était indécent. Je n’aurai jamais pensé, il y a un an, me retrouver au lit avec ce type qui m’avait pourtant tout de suite séduit et fasciné.
Mon petit-ami, si je pouvais l’appeler ainsi, toucha une première fois ma prostate. Je gémis plus fort et incrustai la marque de mes doigts sur son bras gauche et son omoplate droite. Ça ne semblait pas lui faire mal, et je crus même qu’il n’y fit même pas attention car il continuait ses coups de reins.
Sa main attrapa mon membre et imita les gestes de son bassin. Je me mordis plus violemment la lèvre encore en gémissant toujours jusqu’à la jouissance. Tous mes muscles se crispèrent d’un seul coup et je me cambrais violemment. Je sentis également l’orgasme d’Anthox qui me remplit de plaisir. En rouvrant les yeux, je le vis se lécher les doigts avant de venir m’embrasser.
-Tu n’es que plus beau comme ça… me chuchota-t-il comme s’il souhaitait me faire rougir, ce qu’il réussit.
Nos ébats finis, il chercha ma main retombée sur le matelas et la serra. Il était bien plus tendre encore à ce moment là… Il s’allongea finalement à côté de moi. Je lâchai alors sa main pour poser ma tête sur sa poitrine, mon corps en travers du lit. Son bras se posa sur le haut de mon ventre pour récupérer sa prise sur ma main et nos doigts s’entrelacèrent.
Le silence qui pesait dans la chambre n’était brisé que par nos respirations encore saccadées de notre partie de jambe en l’air. Ce silence… Il était apaisant… Je me sentais bien, là, allongé dans le lit d’Anthox Colaboy, nos mains serrées. Après un plaisir intense, se fut un sentiment de bien-être inégalable qui m’envahit. Je contemplai nos mains qui ne bougeaient qu’au rythme de ma respiration avec un petit sourire dont je n’avais même pas conscience.
Nous restâmes un moment comme ça avant que mon amant ne se redresse et retire doucement son bras. Je m’écartais et me tournais vers lui, interrogateur. Il commença à se rhabiller et je fis de même. Enfin, pas entièrement car mon t-shirt était à l’autre bout de la pièce et je n’avais pas envie de me lever du lit. Anthox me le jeta en pleine figure.
-On descend ? demanda-t-il.
Je haussai les épaules avant d’enfiler mon haut.
-Si tu le souhaites…
Il sortit alors de la chambre. Je le suivis jusqu’en bas où nous nous assîmes sur le canapé. Il alluma la télé sur la chaîne d’information.
« La police était sur le lieu du cambriolage en grand nombre mais les deux fugitifs n’ont pas été attrapés ni même reconnus. Selon les policiers chargés de l’enquête, ils ont tués les hommes qui sécurisaient la Banque cette nuit-là avant de pénétrer dans la plus grande salle des coffres. Puis ils seraient ensuite parti et auraient disparus dans le district C, échappant ainsi aux forces de l’ordre. Ils sont introuvables aujourd’hui. »
Je voyais le large sourire sur le visage d’Anthox en écoutant cela.
-Ils ne nous ont pas reconnus ! s’exclama-t-il. C’est parfait…
-Et ton sens du spectacle ?
-Leur incompétence et la télé prouvent qu’ils n’ont pas examiné le billet que je leur ai laissé… Ils le verront peut-être un jour…
Il se mit à rire avant de se relever, plus énergique que jamais.
-Tu as réussi ton premier braquage ! Et un gros… Ça mérite qu’on se boive une bouteille de champagne, juste pour fêter ça…
J’acquiesçai et il ramena deux verres et la bouteille. Cette fois-ci, ce fut moi qui remplis les deux verres. Nous les prîmes , trinquâmes et bûmes quelques gorgées avant de poser les verres. Je me tournais vers Anthox, adossé à l’accoudoir du sofa.
-Donc… On est ensemble maintenant ? le questionnais-je.
-Bien sûr, sourit-il en s’approchant de moi pour se positionner finalement au dessus. Il m’embrassa amoureusement, tendrement, puis s’écarta de nouveau et finit son verre. Je fis rapidement de même.
La reste de la journée passa bien vite. Je fus surpris quand, au soir, Anthox proposa qu’on aille chez moi cette fois-ci. J’acceptais et nous nous retrouvâmes, le soir, dans mon lit une place, enlacés et s’embrassant. C’était tellement plaisant… Je fermais les yeux et me laissais bercer par la caresse du souffle de mon petit-ami dans mon cou.
Je m’endormis finalement dans ses bras, ceux d’un criminel qui avait capturé mon cœur comme mon intérêt, ceux d’un bandit aussi sexy que mystérieux, ceux d’Anthox Colaboy, et je priais pour y rester toute ma vie…
*Nom entièrement fictif.
Merci d'avoir lu jusqu'à la fin. Ce texte est très important pour moi parce que c'est celui sur lequel j'ai le plus bossé (Anthox en est témoin, il a dû supporter mes conneries racontant un tout petit peu ce que j'écrivais (le pauvre aim dé air)). Il fait onze mille mots. Onze mille putain de mots. Le plus long texte que j'ai jamais écrit et je l'offre à deux adorables vidéastes de talent : Anthox Colaboy et Absol Vidéos. Je sais qu'ils ne le liront sans doute jamais mais je tiens quand même à leur adresser un petit mot :
Merci les gars pour ce que vous faites. Vous nous faites rire chaque jour, vous nous divertissez (en dépit de la santé, pour Absol. Repose toi mon vieux, nous lâche pas tout de suite). Vous apportez la joie quoi... Vous êtes géniaux ! D'ailleurs, j'ai souvent utilisé la playlist Soundclound des sons d'Anthox pour écrire ce texte qui m'a pris environ trois semaines. Plus personnellement, vous êtes adorable pour l'avoir écouté raconter des conneries et 36 15 un peu ma vie aussi sans me dire "putain mes meufs on s'en balekouilles" (même si vous deviez le penser très fort <3). Ça m'a fait tellement de bien d'être encouragée par Anthox (parce que Absol n'a pas beaucoup le temps de répondre aux messages) par des messages tels que "je suis sûr que ton écriture est excellente", "bon courage ma belle", etc... Ça m'a tellement touché que j'ai souris toute la journée. Il a illuminé certaine de mes journées comme VOUS illuminez la lienne par vos messages.
En bref vous êtes deux hommes talentueux et adorables <3
Maintenant, je souhaite remercier Floraly et Mistakes qui ont corrigés ce texte (c'est rare que je fasse appelle à des correctrices laul). Un gros merci à elle pour avoir pris de leur temps pour corriger mes vilaines fautes et mes incohérences (puis les passages merdiques aussi). Des gros bisous les filles <3
Ensuite, merci à vous, chers lecteurs. Ceux qui le suivent, ceux qui votent, ceux qui aiment ce que j'écris même si c'est pas le fun, ceux qui commentent, ceux qui me soutiennent. Merci à tous, sincèrement, et des bisous <3
Voilà, voilà !