Jimin attendait sur le quai. Sa tête était à moitié dissimulée par son écharpe épaisse qui remontait jusque sur son nez, le protégeant du froid qui régnait en maître en cette matinée. Il était assit, tête baissée, à regarder ses pieds comme s'il s'agissait là de la chose la plus intéressante qu'il ait vu sur terre. Pourtant, si on cherchait bien, on voyait que son regard était à moitié éteint. La seule chose qui prouvait qu'il était un minimum attentif à ce qui l'entourait, c'était ses yeux qui glissaient de temps à autre à l'affichage automatique du tramway.
Depuis deux jours, il agissait comme un mort. Pourtant, ni lui ni personne ne l'était. Sa grand mère allait mal. Et cela suffisait à le mettre dans cet état. Une fois à l'hôpital, il avaient refusé de la laisse partir, sa santé étant apparemment trop fragile encore pour se permettre de la laisser rentrer à la maison. Alors, quand Jimin passait le pas de la porte, il n'entendait plus le bruit de la télévision, et il ne reprimandait plus la veille femme pour des petites bêtises inutiles. Il se sentait juste seul, car ses parents se fichaient pas mal de voir Jimin ainsi. Parfois, le jeune homme avait la chance de manger avec eux. Mais il ne parlait pas souvent, écoutant plus les conversations d'adulte dont il ne voulait pas encore entendre parler.
Et il se remémorait dans ces moments là son enfance. Quand sa grand mère l'appelait à manger, et que ses petits pieds descendaient les escaliers faits de bois trop lisses dans un grondement résonnant. À chaque fois qu'il faisait ça, la vieille femme le reprimandait, mais lui, il souriait. Il savait qu'elle ne faisait ça que parce que ses parents l'attendaient dans la salle à manger, autour de cette table ornée d'assiettes et de verres qui avaient peut être coûté trop cher pour eux. Alors il faisait un câlin à sa grand mère, et mangeait avec toute sa famille.
Encore à ce moment, il était naïf de penser que c'était pour lui que ses géniteurs restaient. Pour lui faire plaisir. Car leurs regards désintéressés se déposaient sur le fruit de leur union, sans aucun sentiment au fond de leurs prunelles. Leurs yeux étaient vides, et Jimin ne s'en apercevait jamais. Il contait ses mésaventures, il criait presque ses exploits, laissant les deux adultes de marbre tandis que leurs lèvres s'orienter d'un sourire faux et que des paroles sans réel sens les traversaient : "bravo". Et puis il allait dans le canapé se faire dorloter par cette femme qui avait mis sa mère au monde.
Jimin aurait rit de lui même, si une jeune femme n'attendait pas au même quai que lui. Elle semblait heureuse et souriait en regardant son téléphone avec un air attendri. Le jeune homme avait beau être triste, il ne voulait pas passer pour un fou à rire, seul.
Le tramway arriva enfin, les rails sifflant à son arrivée, et grinçant à son freinage. Jimin était habitué. Il attendait, toujours au même endroit derrière la ligne blanche de sécurité, que l'engin ne s'arrête pour qu'il puisse y pénétrer.
Ses yeux se relevèrent vers la vitre qui lui faisait face, et il croisa ce regard sombre auquel il était devenu habitué. Encore et toujours lui. Ses cheveux nouvellement noirs retombaient sur le devant de son front, alors qu'il semblait presque s'être attendu à voir l'argenté de l'autre côté de la vitre. Pourtant, rien ne se passa comme d'habitude.
Jimin n'avait plus la foi de se battre dans ce type de moment. Il n'avait juste pas envie de se prendre la tête un peu plus que ce que son cerveau remuait déjà à temps plein, comme cherchant à en faire une soupe de sentiments désagréables qui serraient son coeur déjà bien meurtri. Alors il ne répondit pas à ce duel de regard que lui lança l'autre, ouvrit les portes d'un simple mouvement, et entra dans le wagon en repositionnant son sac correctement sur son épaule.
Il venait de briser la boucle.
Yoongi le suivit des yeux, visiblement surprit, jusqu'à ce que le plus jeune ne soit assit, et posa sa tête contre la vitre, l'air presque totalement vide. Le gardien de nuit n'en revenait pas. Il venait de lui passer sous le nez comme s'il n'avait jamais existé. Était ce seulement possible qu'il renonce ainsi à ce qu'ils avaient construit en tellement de temps? En cette guerre invisible?
Les portes se refermèrent, emportant dans le véhicule Jimin et Yoongi. Le noireaud avait beau chercher à comprendre, il ne parvenait pas à mettre un doigt sur ce qui avait poussé Jimin à appuyer sur ce bouton.
Aujourd'hui, un seul d'entre eux avait gagné, et l'autre avait perdu par manque de force.
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Les vacances me fatiguent plus qu'elles ne m'encouragent à écrire désolée xD (en plus j'essaie d'avancer sur Stranger
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