Bonjour à tous et à toutes, fantômes de TCS !
Aujourd'hui, nous vous présentons pour la première fois depuis un sacré bail, un RP ! (Il y a quand même une différence flagrante de qualité, par rapport à nos vieilles bêtises.) Et pas n'importe quel roleplay, puisqu'ici, nous agissons en tant qu'ambassadrices d'un ship peu voire pas connu du tout : le Carlerator ! (On a même pas honte, les gars.)
Disclaimers : On rappelle quand même que si jamais l'un des deux concernés tombent sur nos bêtises, il suffit de nous envoyer un petit message et tout n'est plus que néant en un clin d'oeil (de Carl, évidemment).
Note : Si ça vous intéresse, on a des moments à vous offrir, si le pairing vous botte.
Alors, c'est un ship bordélique, fait par des gens bordéliques, avec des gens bordéliques, pour des gens bordéliques. Ne prenez absolument pas au sérieux cet OS, jugez sur l'écrit et non sur le ship, just share the love !
- Les deux soeurs cinglées qui retournent écrire parce qu'askip on a un concours à jouer
- … qui passe à Carl ET QUI MARQUE !
La foule était déchaînée ce jour-là. Le temps ajoutait à la frénésie générale, les rayons du soleil excitant toujours plus les supporters pressés comme des sardines dans les gradins du stade de Quidditch. Son mégaphone serré dans sa main, comme d’habitude, c’était ZeratoR qui commentait le match. Une écharpe couleur noir et jaune entortillée autour de son cou pour se protéger la gorge, il avait reçu pour mission au début de ses études par le professeur Chourave de rapporter les moindres faits et gestes des joueurs en y ajoutant bien sûr, sa petite touche personnelle. En effet, sa personnalité radieuse et sa voix portante avaient tout de suite séduit la directrice de la maison Poufsouffle, qui l’avait aussitôt convoqué dans son bureau pour lui proposer de devenir le nouveau commentateur. Proposition que ZeratoR avait immédiatement acceptée, enthousiasmé à l’idée d’obtenir une telle responsabilité.
Au-dessus du terrain d’herbe (qui finalement ne servait pas à grand-chose pour ce sport), les quatorze joueurs s’affrontaient, voltigeant dans les airs et chassant pour certains les différentes balles. Là où les deux attrapeurs cherchaient le Vif d’or pour conclure le match, les quatre batteurs surveillaient les furieux Cognards qui attaquaient les joueurs. Les six poursuiveurs, quant à eux, se disputaient le Souafle, une grosse sphère ocre qui devait être envoyée à travers les anneaux à chaque extrémité du stade pour marquer des points. Et enfin, en dernier, le gardien tournait autour des buts qu’il protégeait des poursuiveurs ennemis.
Mais parmi tous ces joueurs qui ne semblaient n’être, à cette distance, que de petites fusées rouges, or, et noires, il n’y en avait qu’un seul qui retenait l’attention toute particulière de ZeratoR.
Carl-Antoni, que tout le monde appelait Carl, arracha le Souafle des mains d’un adversaire d’une poigne de fer, avant de filer vers les anneaux. Esquivant habilement les poursuiveurs ennemis et se faisant protéger des Cognards par Bren, son meilleur ami et batteur, il lança à pleine vitesse la boule écarlate dans l’un des cercles. Il sourit lorsqu’il entendit le commentateur hurler :
- ET C’EST LE BUT DE CARL MESDAMES ET MESSIEURS ! LE SCORE EST DONC DE 320 À 130 EN FAVEUR DE GRYFFONDOR !
Trempé de sueur, il s’essuya le front d’un air amusé. Ce septième année, ZeratoR, avait pour habitude d’allonger chacune de ses voyelles lorsqu’il criait, et sa voix avait tendance à se briser à chaque fin de phrase. Avec son timbre éraillé qui lui était si propre, il tenait le public en haleine. Il savait quand et comment le chauffer, le calmer, le faire se lever, rire, crier… Certains racontaient qu’il était né pour ça, d’autres disaient qu’il ne faisait que brailler, et que la foule s’excitait du match et non de ses commentaires. Carl, quant à lui, adorait cet homme. Son caractère si rayonnant l’inspirait, et lorsqu’il n’était pas motivé pour un match, il lui suffisait d’entendre sa voix enjouée pour se donner à fond. C’était typiquement le genre de personnes qu’il aurait aimé compter dans sa liste d’amis proches, mais il n’avait encore trouvé aucun moyen de l’approcher. Avec un tel écart d’âge, leurs interactions n’étaient que minimes, et même son statut de capitaine n’y pouvait pas grand-chose.
Le sifflement d’un Cognard près de son oreille ramena Carl au présent, et il cligna des yeux en voyant Bren faire du surplace pendant quelques secondes à côté de lui, alors que son meilleur ami lui sifflait, les dents serrées :
- Carl, arrête de rêver et récupère-moi ce fichu Souafle !
Le susnommé secoua la tête et lâcha des excuses du bout des lèvres, le remerciant intérieurement de lui avoir sauvé la mise. Ses yeux saphir aussi aiguisés que ceux d’un faucon se re-concentrèrent sur le match et il s’élança à la suite de ses deux coéquipiers pour espérer inscrire quelques dizaines de points de plus en attendant que leur attrapeur ne fasse son travail. Filant entre les joueurs, les trois poursuiveurs de l’équipe de Gryffondor s’approprièrent à nouveau le ballon ocre. Utilisant allègrement l’habileté légendaire de Carl et cet esprit d’équipe si connu parmi les rouges et or, ils finirent par se diriger vers les trois anneaux qui leur étaient opposés, esquivant sur leur chemin les Cognards que les deux batteurs de Poufsouffle prenaient un malin plaisir à leur envoyer.
Soudain, alors que l’un des poursuiveurs de Gryffondor s’apprêtait à marquer, une fusée noire et jaune lui fonça dessus. Redressant le manche de son balais volant au dernier moment, le Gryffondor perdit son équilibre et Ayako, celui qui venait d’appliquer cette stratégie si risquée, en profita pour lui voler le Souafle, ce que ZeratoR s’empressa de souligner en criant, excité :
- … mais Ayako vient LITTÉRALEMENT de lui SOUFFLER LE SOUAFLE !
Le poursuiveur de Poufsouffle se retourna alors vers ses propres coéquipiers, mais sa satisfaction ne fut que de courte durée puisque aussitôt, il vit fondre sur lui le capitaine de l’équipe rouge et or. Accélérant, Ayako essaya de le semer, mais s’il y avait bien une chose que tout élève amateur de Quidditch savait dans cette école, c’était que Carl-Antoni était pire que déterminé. Il était obstiné, et quand il avait un but en tête, rien ni personne ne pouvait l’en détourner. Ayako se mit à zigzaguer, son désespoir se reflétant dans ses actions. Mais malgré toute la bonne volonté du monde, rien ne put le sauver lorsque Carl alla jusqu’à effectuer une figure compliquée et assez dangereuse afin de récupérer la balle de la taille d’un ballon de basket, basculant sur son balai et tournant à trois cent soixante degrés pour enfin piquer le Souafle au nez et à la barbe d’Ayako. Cette figure fut d’ailleurs acclamée par le public, mais pas seulement...
- … qui se rapproche d’Ayako et qui- SÉRIEUX MEC ?! Moi qui pensais avoir tout vu !
Un éclat de rire suivit cette exclamation, mais surtout, ce fut la réponse de Carl qui acheva la foule : ce dernier se retourna vers ZeratoR, presque les pieds en éventail, et le gratifia de son plus beau clin d’œil, accompagné d’un sourire des plus provocateurs. Le commentateur eut un rire mi-amusé mi-gêné, et il se récria d’une voix faussement choquée aux spectateurs :
- Mais il m’a fait un clin d’œil ! J’hallucine !
Des sifflements moqueurs retentirent dans le public, et le Poufsouffle aux cheveux bruns et aux yeux azur ronchonna dans le mégaphone alors qu’un sourire étirait ses lèvres bien malgré lui, démentant ses propos agacés :
- Ouais, ouais… Il ferait mieux de pas trop faire le beau, hein !
Cet avertissement fut ponctué d’un coup de batte de la part de Bren, qui venait encore une fois d’éviter à Carl d’être défiguré par un Cognard. Il se prit ses habituelles remontrances, malheureusement inaudibles pour le public, et repartit aussitôt au cœur du match. Les buts s’enchaînaient, les points et l’excitation grimpaient en flèche. Le cerveau de Carl carburait : comment attirer de nouveau l’attention de son aîné ? Il essayait de jouer le plus fidèlement possible à sa réputation “d’Alien”, mais il savait pertinemment qu’il n’était pas suffisamment concentré. Il ne pensait plus qu’à faire son spectacle pour provoquer les réactions de ZeratoR. Or, là, il commençait à être à court d’idées, et ses réflexions lui faisaient toujours plus perdre de son attention au match qui continuait de se dérouler autour de lui. Parfois, Bren tentait de le secouer, sans comprendre ce qui arrivait à son ami d’enfance, mais ses gestes étaient vains. C’est alors que la foule se mit à hurler, à l’image du commentateur :
- Bel arrêt de la part de Revoluti- OH MON DIEU, PAPOU A ATTRAPÉ LE VIF D’OR ! GRYFFONDOR L’EMPORTE ! MAIS QUEL HOMME ! UN VRAI MONSTRE !
Carl s’arrêta brusquement, faisant du surplace sur son Éclair de Feu Suprême. Ils avaient gagné, ouais. C’était cool. Mais son coéquipier venait de lui voler la vedette, et cela lui laissait un goût amer dans la bouche. Il regarda ZeratoR, surexcité, qui mitraillait Papou de compliments. Mais Carl, lui, ne le bombardait pas de mots doux. Son regard aiguisé fusillait l’attrapeur, et il vidait son chargeur de haine et de déception contre lui. Oui, voilà, c’était ça. Carl était déçu, déçu de ne pas avoir pu plus impressionner celui qui avait piqué sa curiosité quelques années auparavant, déçu de ne pas avoir suffisamment d’importance dans ce match pour s’accaparer l’attention du si célèbre commentateur brun de l’école de Poudlard. Mais un sifflement bien trop familier le sortit de sa rêverie, et lorsqu’il tourna la tête vers la source du bruit, il vit noir.
Carl se sentit tomber, et lorsqu’il recouvrit la vision, il était au sol. Sa tête tournait, il voyait flou, et il avait l’impression de ne plus avoir de nez. Il y porta sa main, celle-ci devenant rapidement trempée d’un rouge écarlate, et sentit ce qui semblait être son nez, mais… de travers. Les éclats de voix de ZeratoR lui paraissaient désormais loin, alors que des visages troubles se penchaient lentement au-dessus de lui. Il reconnut Bren, l’air désolé, un Poufsouffle visiblement très fier de lui et heureux, mais surtout, le marquant le plus, l’expression inquiète du beau brun.
Clignant des yeux, Carl tenta de se relever sur son séant, immédiatement soutenu par la poigne forte de son meilleur ami. Celui-ci secoua la tête et marmonna furieusement, de sorte que seul le capitaine de l’équipe de Gryffondor puisse l’entendre :
- Je t’avais dit de faire attention, crétin… !
Cette phrase, à multiples sens, poussa Carl à renifler moqueusement comme il le faisait d’habitude, ce qui bien entendu le fit pousser un cri étranglé en sentant la douleur s’accentuer au niveau de son nez. Jurant à voix basse, il continua de presser sa paume contre ses narines, tentant tant bien que mal d’arrêter le filet de sang qui coulait le long de son visage, teintant ses lèvres abîmées de pourpre et gouttant à son menton pointu. Au loin, il put apercevoir Madame Bibine attraper le batteur de Poufsouffle par le col et lui hurler dessus, ses traits encore plus tirés que d’habitude tandis qu’elle l’engueulait à propos de ce Cognard envoyé à tort alors que le match était déjà terminé. Puis, cachant la scène de sa vue, un mouchoir apparut de nulle part devant le visage de Carl. Relevant les yeux, il vit les sourcils froncés de ZeratoR, alors que celui-ci arborait une mine soucieuse. Levant sa main libre, le poursuiveur prit le tissu sous le regard interloqué de Bren qui observait un comportement qu’il n’avait jamais vu chez son ami d’enfance, et demanda d’un air hésitant :
- Uhm, t’es sûr que ça te dérange pas...?
ZeratoR leva les yeux au ciel, amusé par l’accent québécois très prononcé qui modulait la voix du joueur, et répliqua sur un ton sans équivoque :
- C’est toi qui as le nez pété ici, pas moi.
Acquiesçant face à cette logique sans faille, Carl ôta sa seconde main et comprima le mouchoir contre son nez, le maintenant appuyé tandis qu’il essuyait maladroitement ses doigts tachés de sang contre sa cape de joueur de Quidditch.
Tant pis, songea-t-il, rouge sur rouge, ça ne se verrait pas…
À ses côtés, Bren continuait de le regarder bizarrement, un sourire en coin se frayant un chemin sur son visage impassible. Ça, c’était une première. Il n’avait jamais vu Carl être aussi gêné en la présence de quelqu’un, et bon sang qu’ils en avaient vécues, des situations embarrassantes ! Puis, alors que la clameur de la foule et ses cris indignés se calmaient peu à peu, Bren vint prendre le coude du capitaine et tira dessus pour lui faire signe de se lever. Comprenant le sous-entendu, celui-ci prit appui sur le sol de gazon et sur son ami pour finalement se retrouver debout. Relâchant son coude, le batteur de Gryffondor profita que ZeratoR eut le dos tourné pour hausser suggestivement des sourcils en direction de Carl, ses yeux passant du mouchoir désormais trempé à ses joues empourprées. Saisissant l’allusion, Carl piqua un fard et fusilla du regard son meilleur ami, le menaçant muettement de mort si jamais il osait ouvrir la bouche. Bren sourit, et entraîna le capitaine vers l’infirmerie avant qu’il ne se vide de son sang.
Une fois bien installé dans un des lits blancs et l'hémorragie stoppée, Carl soupira. Il observait les autres blessés se tortiller sous leurs draps, avec pour fond sonore les remontrances et les remarques déplacées de Bren.
- … tu ne peux décemment pas, en tant que capitaine, te permettre d’être aussi…
Carl enfonça sa tête en arrière dans l’oreiller, attendant patiemment que l’infirmière Pomfresh vienne le tirer de cette situation. Celle-ci lui avait ordonné de patienter quelques minutes pendant qu’elle allait chercher de quoi remettre son nez en place.
- … j’ai bien cru que ce Poufsouffle allait t’arracher le nez, et puis-- Attends, est-ce que tu m’écoutes au moins ?
Le Canadien rouvrit les yeux qu’il avait fermés par inadvertance et observa son meilleur ami, avant de commencer d’une voix douce :
- Écoute, Brendou…
Exaspéré, l’autre chassa ses protestations d’un geste de la main et se leva :
- N’essaye même pas de m’amadouer avec un surnom, Carl-Antoni !
Carl frémit et fronça le nez. Il n’aimait pas qu’on l’appelle par son nom entier, qui était beaucoup trop long, et Bren ne l’utilisait que lorsqu’il était sacrément énervé.
- Que tu aies envie de mettre le commentateur dans ton lit est une chose, que tu te sentes obligé de te mettre en danger juste pour qu’il te remarque en est une autre ! Bon sang Carl, ça aurait pu être pire qu’un nez cassé !
- Mais ça ne l’est pas, Bren.
Ce dernier poussa un véritable cri de frustration et se rua pour sortir de l’infirmerie, fumant. Il avait besoin d’air, ou il allait finir par frapper son imbécile de meilleur ami. Au moment où il allait ouvrir la porte, il se retrouva nez à nez avec ZeratoR, qui venait probablement voir comment allait le blessé. Bren laissa échapper une exclamation en le voyant :
- Ah, tu tombes bien toi ! Va lui mettre du plomb dans la cervelle, tu veux ? Parce que moi, il ne m’écoute pas !
Puis, il claqua la porte derrière lui. Ce n’est qu’une fois derrière celle-ci qu’il tiqua, sa précédente discussion tournant inlassablement comme un disque abîmé dans ses pensées furieuses.
Carl n’avait pas nié une seule seconde le fait qu’il voulait mettre le commentateur dans son lit.
Confirmait-il ses propos ? Avait-il préféré les ignorer ? Ou n’avait-il tout simplement pas écouté, encore une fois ? Bren n’en savait rien, et cela l’agaçait au plus haut point. Certes, son vieil ami ne lui avait jamais vraiment caché ses préférences, mais pas une fois il n’avait entendu parler d'une de ses possibles histoires de cœur. Carl était plutôt discret en ce qui concernait l’amour, et le jeune homme à lunettes s’en trouvait bien embêté.
À bien y réfléchir, son Carlos n'était plus très fidèle à lui-même, ces temps-ci. Plus que du score pendant les matchs de Quidditch, il semblait vouloir faire des choses grandioses, se donner en spectacle, se faire remarquer. Bien sûr, en tant que capitaine de l’équipe, il avait toujours été très investi, mais de là à frôler le malaise aux entraînements trop intensifs et à enchaîner les nuits blanches pour étudier ses stratégies… Il avait même commencé à soulever de la fonte ! Et puis, sa timidité devant ZeratoR, tout à l'heure... Ce ton hésitant, ces mains tremblantes, ces joues empourprées… Non, Bren n’avait jamais vu son ami comme ça auparavant, et la situation l’inquiétait autant qu’elle l’amusait.
ZeratoR n’était pas un mauvais bougre, loin de là, mais pour être honnête, Bren avait un peu peur que Carl ne se brûle plus qu’il ne l’avait déjà fait à force de jouer avec le feu.
Ce jeu de chat et de souris devait cesser, d’une manière ou d’une autre.
De l’autre côté du couloir que Bren avait parcouru d’un pas pressé et l’esprit préoccupé, ZeratoR avait fini par pousser la porte après être resté planté là quelques secondes, pétrifié par la vague de mauvaise humeur soudaine qu’il s’était prise dans la tronche. Désormais curieux de savoir ce qui avait bien pu provoquer la colère d’une personne qui semblait aussi imperturbable que le batteur de Gryffondor, il pénétra dans l’infirmerie et, dépassant quelques lits, remarqua le dos tourné de celui qu’il cherchait. Le menton appuyé sur la paume de sa main, Carl-Antoni semblait fixer le mur opposé d’un air particulièrement ennuyé. Quand il sentit une présence se rapprocher de lui, il lança, les dents serrées et le regard fermement dirigé droit devant lui dans une attitude boudeuse :
- Si c’est encore pour m’engueuler, ça n’en vaut pas la peine, Bren.
ZeratoR s’interrompit dans ses mouvements, ayant l’impression de recevoir une douche glacée.
Tu parles d’un accueil, maugréa-t-il intérieurement
- En fait, je venais juste récupérer mon mouchoir, mais bon, tant pis, j’repasserai plus tard.
Comme s’il avait subi une décharge électrique, Carl sursauta à l’entente d’une voix qui ne semblait en rien semblable à celle de son meilleur ami et se retourna brusquement, presque paniqué.
- Uhm, je-- C’est pas ce que je voulais dire-
- Te fatigue pas, j’ai compris que tu m’as pris pour ton ami, souffla ZeratoR, tentant de se débarrasser des mauvaises ondes de Bren. D’ailleurs, je me suis pris une cascade de mauvaise humeur de sa part, tu n’y serais pas pour quelque chose ?, ironisa-t-il.
Le brun n’avait pas l’air de gober facilement n’importe quoi, alors le blond opta pour un semi-mensonge.
- Il pense que je cherche à me faire remarquer, ou je sais pas quoi… Qu’est-ce qu’il t’a dit ?
- De te mettre du plomb dans la cervelle. Et je rejoins son avis : pour faire un trois-six hyper risqué, je vois pas ce que tu cherchais, sinon à faire le spectacle. Ta mère t’as laissé tomber sur la tête quand tu étais gosse, ou quoi ?
ZeratoR avait ponctué cette phrase d’un sourire amusé. Certes, il lui faisait un reproche, mais c’était à sa manière, manière bien plus agréable et moins abrupte que celle de Bren. Carl savait bien que son ami ne voulait que son bien, mais ce dernier était souvent trop maladroit avec les mots et ses émotions. Le blessé, après avoir ri à la remarque du commentateur, tendit alors sa main vers la table de chevet et attrapa le mouchoir en tissu, désormais entièrement pourpre. Il le rendit à son propriétaire, murmurant un vague ‘désolé’ qui fut accueilli par un gloussement attendri. Le blessé avait changé de caractère à une vitesse ahurissante, nota mentalement ZeratoR : tandis qu’à son arrivée, il avait eu droit à un accueil des plus glaciaux, désormais, le capitaine de Gryffondor semblait totalement ailleurs. Il parlait lentement, comme pour bien mesurer ses mots, et pas une fois leurs regards ne s’étaient croisés. Le brun se pencha alors doucement devant le visage de Carl, pour l’obliger plus ou moins subtilement à le regarder dans les yeux. Ce dernier piqua un fard à cette soudaine proximité et balbutia :
- J’peux savoir ce que tu fais, là ?
- C’est malpoli de pas regarder quelqu’un alors qu’il te parle, tu sais. Tu serais pas un peu nerveux, par hasard ?
Le ton moqueur qu’avait pris le commentateur irrita le blessé, qui s’exclama .
- Moi, nerveux ? Où est-ce que tu vas chercher ça ?
- Tends ta main.
- Quoi ?
- Tends ta main, j’te dis.
Carl s’exécuta, anxieux. Qu’est-ce que sa main venait faire dans cette histoire de nervosité ?
- Eh bah, elle bouge bien ta pattoune !
La honte envahit immédiatement Carl qui enfouit sa main tremblante sous la couette blanche, un petit ‘tabarnak’ s’échappant instinctivement d’entre ses lèvres alors qu’il tournait la tête pour esquiver le regard perçant et déstabilisant de ZeratoR. Ce dernier étouffait tant bien que mal le rire qui enflait dans sa gorge, un soupçon de compassion le poussant à éviter plus d’embarras au jeune homme complètement rouge pivoine de gêne qui lui faisait face.
Heureusement pour le Gryffondor, c’est à ce moment-là que Madame Pomfresh fit irruption dans la pièce, mélangeant dans un rythme soutenu le liquide couleur olive aux reflets irisés contenu dans le grand verre qu’elle tenait à la main. Elle se rapprocha du lit de Carl et, jetant au passage un regard étrange au Poufsouffle qui s’était aussitôt reculé à son entrée, lui fit signe de boire le curieux remède. Pendant qu’il déglutissait lentement le sirop au goût amer, elle se mit à nettoyer le linge qu’elle avait utilisé pour éponger son nez, le plongeant à répétition dans une bassine pleine d’eau chaude alors que, comme bien d’autres avant elle, elle lui faisait la leçon :
- J’espère que vous êtes au courant, monsieur Cloutier, que cette infirmerie n’est pas ici pour vous servir de second foyer ?
Rendu silencieux par le verre d’une dimension bien trop énorme et sa boisson qu’il se devait d’avaler en entière, Carl ne put que se retenir à grande peine de lever les yeux au ciel. N’accordant aucun regard au commentateur à sa gauche, il préféra terminer la potion en toute tranquillité, alors que Madame Pomfresh lâchait finalement le linge dans un bruit mouillé retentissant. Celle-ci récupéra le verre désormais vide, et repartit vers son bureau - non sans menacer une dernière fois le poursuiveur de Gryffondor de lui coller un coup de pied au derrière s’il osait revenir -, lui fichant enfin la paix. Carl leva finalement son regard bleuté, affrontant son destin.
Et il aurait peut-être préféré ne pas le faire, maintenant qu’il y repensait.
Parce que oui, ZeratoR était littéralement en train de se fendre la poire, sa bouche pressée en une fine ligne alors qu’il tentait de museler son rire, et des larmes se formant aux coins de ses yeux. Carl haussa un sourcil, et l’autre articula tant bien que mal :
- “Cloutier”…? Sérieux ?
Le rouge et or laissa le silence répondre à sa place.
- Mec, ce nom, c’est pas un clou dans le pied, un peu ?
Au moment même où Carl s’apprêtait à gentiment lui dire d’aller se faire foutre, la porte de l’infirmerie s’ouvrit à nouveau, mais d’une façon bien plus douce que l’avait fait Bren. Un jeune homme aux cheveux d’un beau roux flamboyant débarqua, laissant échapper un soupir de soulagement en voyant ZeratoR assis à côté du lit de Carl.
- Ah, t’es là !
- Thomas ? Qu’est-ce que tu fais ici ?, demanda le Poufsouffle, surpris.
- Ça fait dix minutes que je te cherche Adrien, t’aurais pu me prévenir au moins avant de te carapater du stade…, râla le nouvel arrivant.
Puis, son regard naviguant entre le Gryffondor au visage rougi par de multiples émotions contraires et dont le nez semblait peu à peu se remettre en place dans de petits craquements douloureux très glamours, et son meilleur ami qui ne semblait sincèrement pas désolé pour un sou, il marmonna d’un air suspicieux :
- J’ai interrompu un truc, c’est ça ?
Carl tourna la tête, laissant cette tâche à son aîné qui se contenta de rire nerveusement.
- Pas le moins du monde ! Tu voulais quelque chose ?
- Ouais, madame Bibine te cherche, c’est sûrement pour te parler de ton remplaçant pour l’année prochaine.
- Tu peux lui dire que j’arrive ? Je dois régler un dernier truc.
- Pas de problèmes, à condition que tu me racontes tout ça après. (il ponctua cette phrase d’un clin d’œil.)
- T’inquiètes, merci Toto, t’es un ange.
Sur ce, le roux s’éclipsa pour retrouver la professeure de Quidditch. Aussitôt, Carl ne laissa pas une seconde de répit à son aîné et lança d’un ton affreusement moqueur :
- “Adrien” ?
Le susnommé étouffa un juron. Évidemment, Thomas avait encore gaffé. Mais pourquoi devant LUI ? Le sourire arrogant qui trônait sur le visage de Carl-Antoni ne donnait qu’une envie à l’homme qui s’était rebaptisé ZeratoR : séparer sa tête de son cou.
- Tu oublies ça. C’est ZeratoR, surtout pour toi.
- Aucun problème, Adrien.
Les poings du brun se serrèrent. Vraiment, celui-là… Mais ce problème allait se résoudre autrement. Le commentateur avait plus d’une carte dans sa manche. Il se racla alors la gorge bruyamment avant de dire de son plus bel accent québécois et bien caricaturé :
- S’tu veux jouer à ça m’sieur Cloutier, tu vas y laisser des plumes, crois-moi.
C’est ce moment que choisit madame Pomfresh pour venir tirer ZeratoR par les oreilles, lui répétant que sa collègue voulait le voir et qu’il avait suffisamment traîné. Carl lui lança un regard défiant et empli de provocation, lui assurant muettement que cette conversation n’était pas terminée.
Quelques minutes plus tard, le Canadien put sortir de l’infirmerie. Il s’en alla retrouver Bren, souhaitant s’excuser - à contrecœur bien sûr, fierté de Gryffondor obligeait. Lorsque son meilleur ami le vit arriver, ses yeux s’agrandirent : Carl arborait un sourire rêveur comme il n’en avait jamais vu sur son visage de Gryffondor borné.
- Je croyais que tu t’étais pris le Cognard dans le nez, pas dans la tête ?, persifla-t-il.
L’autre lui envoya précautionneusement son poing dans l’épaule, une expression à la fois offensée et rieuse chassant les restes de sa béatitude. Le batteur ricana, tandis que Carl bougonnait, buté :
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Ah oui ? Ce n’est donc absolument pas à cause des charmes du beau commentateur que tu tires une telle tête d’imbécile heureux ?, taquina Bren, son rire s’intensifiant en voyant les oreilles de son compagnon rougir.
- La ferme, grogna ce dernier, toute répartie envolée et son orgueil l’empêchant de laisser couler l’altercation.
Bren passa son bras autour de son cou, et tapota le nez fraîchement guéri de Carl. Son côté maternel reprenant le dessus, il demanda :
- Ça va, pas trop mal ?
- Non non, t’inquiètes, répondit le capitaine avant de reprendre d’une voix hésitante, hé, Brendou..?
Le-dit ‘Brendou’ laissa échapper un ‘‘hm’’ interrogatif.
- J’suis désolé pour tout à l’heure, tu sais, quand…
- Quand tu as encore fait ta tête de mule ?, termina gentiment son meilleur ami.
Carl inspira, ravalant son amour-propre et teintant sa voix de culpabilité.
- Ouais.
Bren ébouriffa les cheveux courts de son ami rouge et or et accepta silencieusement les excuses qu’il lui offrait - chose assez rare pour être notée -. Puis, ne pouvant plus y résister, il lui étira les joues à l’image d’une grand-mère en répétant qu’il était ‘’beaucoup trop mignon’’, ce à quoi, évidemment, Carl râla en multipliant les coups dans les côtes et en lui aboyant d’arrêter. Bren finit par lâcher ses joues, qui s’étaient colorées de rouge, riant à gorge déployée tandis que Carl se frottait furieusement les muscles maltraités en l’insultant à voix basse. Comme il leur restait facilement un quart d’heure avant que les cours ne reprennent, le batteur de l’équipe de Gryffondor en profita pour réclamer des éclaircissements de la part de son meilleur ami. Et cela, bien sûr, de façon tout à fait discrète et élégante.
- Bon, et sinon, tu m’expliques pour le cul du commentateur ?
Qui avait dit que Bren rimait avec aristocratie ?
- Il n’y a rien à expliquer, marmonna Carl, pas franchement à l’aise sur le sujet.
- Oh, bien sûr. Donc le fait que l’on puisse t’identifier à une tomate, là maintenant tout de suite, ça n’a rien à voir avec les beaux yeux de ZeratoR ?, renchérit Bren.
Il était totalement maître de la conversation, et il le savait. Et qu’il le sût enquiquinait - en toute politesse - sérieusement Carl. Le poursuiveur était cerné, et il en soupira.
- Tu sais très bien que ça fait des années que j’attends ça.
Bren lui fit de gros yeux, et lâcha :
- Ouais, t’es gay quoi.
Carl roula les siens dans ses orbites et corrigea :
- Je dis pas que je suis gay…
Bren arqua un sourcil.
- … je dis juste que je le serais s’il le demandait.
- Ah oui, c’est sûr que c’est vachement différent !, fit le batteur en réprimant un fou-rire devant le côté têtu de son meilleur ami.
- Brendou…
- Oui, oui, je sais, ‘’la ferme’’, le taquina-t-il d’un air amusé en mimant des guillemets. Faut que tu changes de disque, tu vieillis Carlos !
Et pour toute réponse, Carl se contenta de lever son majeur.
Le temps passa.
Le nez de Carl, qui avait été guéri en un temps record par l’infect remède de l’infirmière de Poudlard, n’avait bientôt été qu’un événement rapidement oublié. Le coupable avait fait perdre de nombreux points à sa maison, et si certains avaient pu penser que cette péripétie aurait poussé le célèbre commentateur à moins apprécier le capitaine des rouge et or - rappelons qu’il était lui aussi de la maison Poufsouffle, après tout -, ça n’en avait absolument pas été le cas. Le prochain match de Gryffondor contre Serdaigle approchait à grands pas, et Carl, malgré son aventure, avait tout sauf cessé son travail acharné.
Bien au contraire.
Chaque soir, il soulevait ses haltères, bien trop longtemps au goût de Bren. Aux entraînements de Quidditch, Carl se donnait comme s’il était en match, voire plus. Il frôlait l’évanouissement après chaque session. Madame Bibine lui avait déjà dit de se ménager, mais Carl-le-têtu n’en avait, encore une fois, fait qu’à tête. Bren l’observait parfois, lorsqu’il croisait ZeratoR au détour d’un couloir. S’échangeaient alors quelques mots, un peu de provocation sur l’accent québécois et le “Adrien”, ou même parfois juste un sourire. Oui, Carl avait désormais ce contact qu’il cherchait depuis plusieurs années. Mais c’était trop léger. Ce n’était pas assez. Ce n’était plus assez. Il le voulait lui, et pas seulement son bonjour. Et comme Carl-Antoni était un homme qui restait toujours fidèle à lui-même, il s’entraînait jour et nuit. Dans l’espoir qu’il le remarque, encore une fois. Alors, le capitaine de l’équipe de Gryffondor avait gagné en force, en endurance, en vitesse, en muscles. Mais il avait perdu en joie, en sommeil, en appétit, en sourire. Il suivait les cours tant bien que mal, son cerveau à bout l’empêchait de comprendre la moindre chose, ses yeux fatigués n’arrivaient plus à déchiffrer les tracés de craie sur le tableau, et son teint cadavérique inquiétait au plus haut point son meilleur ami. Mais c’était toujours le même refrain lorsqu’il tentait de lui tirer les vers du nez.
“Je n’ai rien. Tout va bien.”
Et Bren ne savait plus quoi faire, alors la situation persistait.
Jusqu’au jour où Carl s’écroula, et ne se releva plus.
Ce jour-là, Bren ne se rappelait pas avoir autant couru de toute sa vie. Ni pleuré. Il parcourait les couloirs de Poudlard, son ami tenant en équilibre instable sur son dos, manquant de chuter à chaque virage. Le jeune homme à lunettes répétait inlassablement à voix haute, plus pour se rassurer lui-même que son capitaine :
- Ça va aller, Carl, je te l’assure, je t’en prie accroche-toi ! Reste avec moi, idiot !
Lorsqu’il débarqua à l’infirmerie, des murmures inquiets s’élevèrent autour de lui. Bren appelait Madame Pomfresh au secours à s’en déchirer les poumons. Lorsqu’elle arriva, l’air préoccupé, il la conjura de l’aider, d’aider son meilleur ami, de le lui rendre. La vieille femme allongea le plus rapidement possible l’inconscient - dans tous les sens du terme - dans un lit, essayant de garder son sang-froid. Le garçon en larmes s’assit à ses côtés, serrant sa main dans la sienne. Ses pensées vacillaient entre mots doux et insultes, entre compassion et colère, entre peur et tristesse. Il ne savait plus quoi faire. L’infirmière, aidée de ses assistantes, ausculta au mieux Carl. Le verdict tomba sur Bren tel une épée de Damoclès : son ami était tombé dans un coma de stade deux, dû à un surmenage. L’abolition de sa conscience était complète, et il avait perdu toute sorte de contact avec le monde extérieur. Seul point encourageant, son corps réagissait aux fortes stimulations. Selon Madame Pomfresh, cela pouvait durer au mieux une semaine, au pire quelques mois. Mais pour Bren, déjà une minute passée à regarder les yeux clos de son idiot d’ami semblait être une éternité. Et il resta là, avec sa seule conscience lourde de culpabilité pour compagnie.
À Poudlard, les nouvelles se répandent comme une traînée de poudre.
Et cette fois-ci ne fit pas exception à la règle. Alors que le couvre-feu était déjà déclaré pour la plupart des élèves - abstraction faite des joueurs de Quidditch qui avaient le droit d’aller s’entraîner si leur capitaine leur donnait l’autorisation -, quelques étudiants, toutes maisons confondues, s’étaient pressés pour venir voir d’eux-même l’état du poursuiveur de Gryffondor, connu à travers l’école pour ses exploits et son anatomie alléchante. Des murmures fourmillaient dans le couloir de l’infirmerie jusqu’à ce que Madame Pomfresh ne chasse ces voyous à coups de balais.
Deux jours s’écoulèrent comme ça. Bren suivait ses cours comme tous les autres, se traînant une mine assombrie qui ne lui seyait pas, puis passait le reste de son temps libre au chevet de son meilleur ami. En l’absence de ce dernier, on avait donné la responsabilité de capitaine au batteur, mais il n’avait pas encore dû s’essayer à ce rôle, et il espérait sincèrement ne pas avoir à le faire. Bren n’était pas stupide, il savait que son état allait empirer s’il ne se tenait pas occupé, alors quand il tenait compagnie à Carl, il étalait ses cahiers et recopiaient minutieusement chacune des lignes qu’il avait lui-même inscrites durant la journée.
Rien de bien marrant là-dedans, mais ça avait au moins le mérite de le distraire et de conserver sa tête vide de pensées.
Au fil des heures, il avait vu passer bon nombre de visiteurs. Entre les différents membres du fan-club de Carl - dont il n’était probablement même pas au courant de son existence -, leurs coéquipiers inquiets pour leur capitaine qui était aussi leur ami, et les quelques professeurs qui affectionnaient le Gryffondor, Bren avait vu beaucoup de monde ouvrir la porte de l’infirmerie pour Carl.
Mais s’il devait nommer une personne qui semblait aussi acharnée que lui à venir régulièrement, c’était probablement le commentateur de la maison de Poufsouffle, ZeratoR.
Bren n’aurait su dire s’il avait été surpris ou non, en voyant ce dernier se faire une place à côté de lui le premier jour. Silencieusement, en n’adressant au batteur rouge et or qu’un humble hochement de tête en guise de salutation, le noir et jaune était demeuré là, les jambes croisées en tailleur et le regard posé sur le visage tristement pâle et paisible du comateux. Bren, durant ces deux jours de veille, avait cru découvrir une toute nouvelle personne. Et pourtant, c’était toujours ZeratoR, le brailleur de Poufsouffle, le brun charmant et charmeur aux iris bleus qui distribuait de la bonne humeur à ceux qui l’entouraient, et qui s’amusait autrefois à jouer au chat et à la souris avec Carl. Comment une telle personne pouvait-elle être aussi calme ?, se demandait parfois Bren en le voyant entrer à pas feutrés dans l’infirmerie, comme s’il craignait de réveiller celui pour qui il venait. C’était plus que surprenant, c’était tout à fait déconcertant. Le deuxième jour, alors que tous les autres étudiants étaient encore dans le Grand Hall en train de petit-déjeuner - Bren ayant pris l’habitude d’emporter son propre plateau à l’infirmerie (Madame Pomfresh n’avait pu que céder face à ses yeux suppliants), il avait eu la stupéfaction de voir ZeratoR arriver avec ce qui semblait être un pot de fleurs. Marmonnant comme quelque chose quoi c’était une passion qu’il n’aimait pas trop exposer, le Poufsouffle avait soigneusement déposé des perce-neiges sur la table de chevet, les ajustant pour qu’ils reçoivent bien toute la lumière du soleil qui filtrait à travers les volets à demi-clos. Le brun s’était assis aux côtés de son cadet. Le silence entre eux fut presque solennel, jusqu’à ce que Bren le brise :
- Umh, les fleurs ont un langage particulier, n’est-ce pas… ?
ZeratoR soupira doucement.
- Elles sont censées représenter l’espoir de jours meilleurs.
Bren resta un long moment à le fixer avant de poser sa main sur son épaule, geste qui se voulait compatissant, avant de reprendre la main tiède de son meilleur ami. Et ils restèrent là, remuant leurs pensées tristes et sombres dans un mutisme affligeant, à espérer des jours meilleurs.
Un nouveau jour passa. Toujours la même routine : cours, infirmerie, dortoir. Un autre. Puis une semaine. Et Bren et ZeratoR arrêtèrent de compter. Leur vie continuait de s’écouler tandis que celle de Carl était en ‘pause’, et le bouton ‘marche’ ne fonctionnait plus. Le soleil et la lune s’alternaient dans une morosité glaçante...