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Un graffiti sur le casier - Première partie : Le lycée, Laevi et Atrocine

Hache
Hache
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Dim 21 Jan - 18:58
Hache
Un graffiti sur le casier

Première partie : Le lycée, Laevi et Atrocine.

-Bonne soirée les gars, c’était un entraînement au top ! Crié-je à l’adresse de mes coéquipiers de basketball tout en sortant des vestiaires.
Ils prennent leur douche. Pas moi. Jamais.
Je marche maintenant seul dans les couloirs déserts du lycée. Les entraînements de notre équipe masculine de basket commencent juste après la fin des cours donc il n’y a presque plus personne et j’ai le lycée pour moi seul. C’est rarement aussi calme ! Mais j’adore l’école. Cette rentrée a été une telle aubaine. Hormis ma grande sœur qui est entrée en terminal, personne ne me connaissait. Alors, ici tout le monde me connaît en tant que Laevi Cratay, qui je suis vraiment.
Je passe en face d’un groupe. J’en reconnais certains. Je pense qu’ils sont dans ma classe. Que font-ils encore là à cette heure-ci ? Je les observe, intrigué. Ma présence ne les dérange pas, on dirait.
Ils sont en train d’écrire des trucs au marqueur noir sur le casier d’Atrocine Salix. Je connais son nom et sais quel est son casier, mais ce n’est pas mon amie. En fait, je ne lui ai même jamais parlé. Je crois que j’ai développé un coup de cœur pour elle. Je ne suis pas timide et je n’ai aucun mal à discuter avec qui que ce soit… Sauf elle. C’est stupide, mais à chaque fois que j’essaie de lui parler, je rougis, bégaie et surtout, je sue. Genre, un max. Maman dit que c’est normal à quinze ans, mais ça reste la honte. Faut bien avouer qu’elle a l’air super cool. Bien-sûr, elle est jolie. Elle a un visage doux et rond, des tâches de rousseurs et une crinière rousse juste sublime. Je veux dire, ils sont bouclés, orange comme sortis d’un anime et ils ont l’air si soyeux. Mes cheveux, je ne peux pas les coiffer. Ma tête entière est un épis, ils font ce qu’ils veulent. En cours, elle tripote toujours son appareil photo de professionnel. Enfin, je crois. Je ne m’y connais pas, mais il a l’air compliqué à manier. Et elle a toujours deux ou trois zooms avec elle dans son sac. Souvent, après mes entraînements, sur le chemin vers la maison, je peux la voir nourrir les chats errants dans une des rues du quartier. Elle les photographie parfois aussi. Et en plus, elle rapporte ses propres déjeuners à la cantine et je n’y ai jamais vu de viande. Elle doit être végétarienne, comme moi ! Elle aime et aide les animaux, c’est forcément une bonne personne.
Les autres lycéens partent en pouffant. Je m’approche du casier pour lire ce qu’ils ont écrit et… Ce n’est pas beau à lire. Comment peuvent-ils dire des choses aussi horribles sur elle ? Je ne peux pas la laisser voir ça, ça lui ferait de la peine. Je me dirige vers le local de nettoyage. Il n’est jamais fermé. Aucun graffiti aussi récent ne résiste à une éponge et un peu d’eau.
Est-ce qu’elle se fait harceler ?

==

Ce cours de philosophie n’en finit pas ! Le prof nous raconte sa vie - ou plutôt celle de sa fille - encore et encore. C’est chouette de voir un père autant aimer son enfant, mais on s’en fiche ! C’est la pire matière. Je repensais à hier soir. Je me demande s’il faut que je le dise à quelqu’un. Peut-être à Atrocine elle-même ? Elle penserait peut-être que je me moque d’elle ou que j’essaie de me vanter ? Ce n’est probablement pas une bonne idée. C’est peut-être un coup isolé aussi. Ils ont écrit ces horreurs sur son casier par hasard et en fait, ça pouvait bien s’adresser à n’importe qui.
J’essaie de jeter un coup d'œil discret à Atrocine, mais ce n’est pas facile. Elle se met toujours dans le fond et moi, tout devant. Faut vraiment que j’arrête cette habitude de gros intello. Si je n’avais pas été sélectionné dans l’équipe de basket, je serais probablement impopulaire. Je la regarde dans les yeux et elle me regarde également dans les yeux. Pour la discrétion, c’est raté. Ses yeux sont vachement clairs. Comme gris, mais teinté de vert. Elle baisse les yeux et se ratatine sur son siège, comme si elle voulait disparaître. Je me retourne en rougissant. J’espère que personne ne m’a vu ! Heureusement que je suis tout devant. Personne ne peut voir mon visage de tomate. Une tomate idiote avec de grands yeux trop baladeurs.

Le calvaire qu’est ce cours termine enfin. Atrocine est la première à partir et passe en trombe devant moi. J’essaie de lui parler, mais impossible. Si je voulais être poète, je dirais que sa beauté me coupe le souffle. En étant plus terre à terre, l’adolescence est juste une sale période.
Tant pis, j’ai mon club d'échecs à rejoindre actuellement. Officiellement, on est un club d'échecs. Dans les faits, je dirais qu’on est à cinquante pourcent un club de manga. Au départ, ils étaient méfiants. Le nouveau de l’équipe de sport du lycée qui veut rejoindre leur club ? Mais “Kuroko no basket” fait un pont formidable et met tout le monde d’accord. On est que six, mais on est entre hommes. Je ne dois pas avoir ma dose de testostérone avec les basketteurs, il faut croire. Je ne comprends pas pourquoi aucune fille ne veut rejoindre notre club. J’aurais bien proposé à ma sœur, mais Monogie est plutôt du genre à casser des trucs que réfléchir à une stratégie. De toute façon, elle a tellement d’heures de colle qu’elle n’a pas le temps pour les clubs. Mais la moitié de ses heures sont injustes. C’est parce qu’elle embrasse saon petit.e-ami.e Sheen dans les couloirs. Et qu’iel est perçu.e fille donc lesbophobie oblige, iels se prennent des punitions. Après, iels cherchent parfois en s’embrassant pile devant le bureau du directeur. Puis, l’autre moitié des colles sont méritées ; Graffiti, destruction de matériel ou doigt d’honneur contre les enseignants et j’en passe ! Maman ne sait plus quoi faire. Elle veut encourager Monogie à croire en ses convictions politiques et morales, mais voudrait un peu plus de calme. Quoi que, ce n’est pas avec Rosifo ma terreur de petit-frère qu’elle va en avoir ! Il est gentil, mais très énergique et ne se rend pas toujours compte des bêtises qu’il peut faire. Ni du bazar qu’il ose laisser dans notre chambre ! La semaine passée, il a ruiné mes draps en faisant exploser un pétard dans mon lit. Kuroko a un trou dans la tête, maintenant !

Le temps de club est terminé. Il est midi et j’ai faim. Je me dirige avec les autres membres vers le réfectoire. C’est le seul endroit où il y a des tables et chaises utilisables pour y manger. En plus, il y a un micro-onde. à peine a-t-on passé le porche d’entrée que le bruit est assourdissant. Le réfectoire est grand et lumineux grâce aux baies vitrées. Il y a des tables dehors pour y manger, mais le calme ne vaut pas la salle chauffée. La tramontane glacée souffle depuis ce matin. Dedans, ce sera très bien. Je me dirige vers le micro-onde tandis que mes amis vont faire la file pour manger. J’ai ma lasagne végétarienne préparée par ma mère dans mon sac et vu le menu du jour - brigade de morue - j’en suis bien content. Je vois ma sœur au fond avec son groupe d’amis. Ils sont le cliché du groupe gothico-punk du lycée. Maman n’a pas apprécié quand Monogie a fait un piercing à son arcade sourcilière en cachette. Moi, j’aime bien. Je trouve que ça met ses yeux en valeur. Ils sont marrons, comme les miens. C’est Rosifo qui a hérité des yeux gris bleutés de notre mère. Il a aussi des cheveux châtains et une peau relativement claire. On pourrait presque croire que c’est un blanc qui revient de vacances. Mais aucun doute sur le métissage pour ma soeur et moi.
Le micro-onde bip pour m’indiquer que mon repas est chaud. Il ne me reste plus qu’à chercher une table où on rentre à six…
Il n’y a pratiquement plus de places libres, mais je remarque une table presque vide. Il n’y a qu’une personne assise là et c’est Atrocine. Je crois que je n’ai jamais remarqué à quel point elle est seule.
Je me dirige vers sa table et m'assieds en face d’elle en la saluant de la main. Elle se lève et part immédiatement, sans répondre. Son tupperware est vide. Cette interaction est un sacré fail.
Mes amis me rejoignent pour qu’on mange ensemble.

==

En ce dernier cours de la journée, je suis en train de dessiner. En mathématiques. Mais j’ai une bonne excuse ; j’ai fini les exercices. Les maths, c’est facile. Et vu que je suis l’un des seuls à ne pas mettre le bazar en cours, la prof me laisse vaquer à mes occupations. Faut dire qu’elle n’a pas beaucoup d’autorité, la pauvre. Elle se fait dévorer par les élèves. Et puis, j’aimerai bien pouvoir dessiner mes propres mangas et raconter mes propres histoires. Sauf que là tout de suite, je n’ai pas d’inspiration.
ça me laisse le temps d’observer mes camarades. Je remarque alors l’une des filles que j’ai vu l’autre jour. L’une de ceux ayant écrit des horreurs sur le casier. Scapania, je crois. Elle a des cheveux noir et soyeux lui allant jusqu’au fesses. Elle a de long cils sublimés par un pottu qu’elle met souvent. La fille et le garçon avec qui elle rigole étaient là-bas aussi. J’ai zappé leur noms. Ils lisent un mot écrit sur une feuille en riant avant d’en faire un avion en  papier qu’ils envoient sur Atrocine. Ils sont trop loin, je n’ai pas pu entendre ce qu’ils ont écrit, mais vu ce qu’il y avait sur le casier et leur mines suffisantes, je doute que ça soit des excuses. Le mot atterrit vraiment proche d’elle. C’est qu’ils visent bien. Je cours alors l'intercepter et manque de trébucher sur un sac. Mais je ramasse l’avion avant Atrocine qui me dévisage en fronçant les sourcils. J’enfonce le bout de papier dans ma poche en disant un “euh…” pitoyable. Pas la peine, je n’ai aucune excuse inventée qui me vient à l’esprit. Alors, je retourne vers ma place. Même madame Carex me fixe. Elle semble mécontente et m’envoie faire les exercices au tableau. Elle ne peut pas m’engueuler plus que ça, j’ai trouvé toutes les bonnes réponses.

==

J’en suis certain ; ma crush se fait harceler. Pratiquement tous les soirs, j'efface des graffitis sur son casier. Chaque cours, j’intercepte des mots en classe. Et j’ai même désamorcé une sale farce. Le groupe de Scapania est composé d’elle-même, des deux autres de la classe, d’un de mes potes de basket et d’une fille qui est, je crois, en première. Ils ont vidé un tube d’acrylique dans un seau d’eau qu’ils ont calé en équilibre au-dessus de la porte légèrement entrouverte des vestiaires des filles après la fin des cours de sport parce qu’ils savaient qu’Atrocine sort toujours dernière. C’est mon (ancien) pote qui l’a mis là. Heureusement, moi aussi je suis grand. J’ai retiré le seau et j’ai été les confronter. Mais ils ne m’ont pas du tout pris au sérieux. Ils m’ont dit que c’était juste une blague, que j’étais un rabat-joie et que je ferais mieux de me mêler de mes affaires. Sauf que j’ai pris des photos de leur farce du seau de peinture ainsi que d’un de leur graffiti sur le casier. On les voit dessus. Je les ai imprimées à la maison. J’ai aussi pris soin de noter leurs noms sur un post-it lors des appels en classe. Clino et Nepeta. Je n'arrête pas d'oublier leur prénom alors qu'ils sont dans ma classe. Je me dirige en ce moment même, mon petit dossier  soigneusement mis dans une feuille plastique, vers le bureau de la CPE avec qui j’ai rendez-vous.

Je toque à la porte et attends son signal avant de rentrer.
-Bonjour, je viens vous signaler un cas de harcèlement !
Elle soupire, l'air exaspérée. Et je perds toute mon assurance. Je ne m’attendais pas à une scène d’action épique, mais là… J’ai l’impression de m’être heurté à la banquise.
-Tu te fais harceler ? Me demande-t-elle en levant les yeux au ciel.
-Non, pas moi. C’est une fille de ma classe. Son nom est Atro…
-Et pourquoi n’est-elle pas là ? M'interrompt-elle sèchement.
-Je ne sais pas, j'imagine qu’elle n’ose pas…
Je ne suis pas idiot, je vois bien que je l’embête. Il me reste ma carte maîtresse.
-J’ai des preuves ! Dis-je en déposant les photos en face d’elle.
J’arbore un air fier, mais je déchante vite en voyant son air blasé tandis que ses yeux bleu délavé se détachent des images. Elle les jette à la poubelle en haussant un sourcil comme si c’était le truc le plus supide qu’elle avait pu voir. Quel culot ! Mes preuves !
-Si ta camarade ne dit rien, c’est peut-être que ça ne la dérange pas.
-Mais… Tenté-je
-Mademoiselle Nemore est une bonne élève…
Elle ment. Scapania est une élève très moyenne et perturbatrice. Mais ses parents font partie du conseil des parents d’élèves alors…
-Et Trilo Bazzan est un ami de ton équipe de basket, tu ne voudrais pas qu’il ait des ennuis.
Ce n’est plus mon ami, je ne suis pas ami avec des harceleurs. J’ai des principes, moi, madame ! Et il mériterait d’être puni. Mais je ne peux pas lui dire ça car elle ne me laisse pas en placer une.
-Bon, notre rendez-vous est fini. Je te libère, j’ai des élèves avec de vrais problèmes à voir.
Je sors. Non sans claquer la porte derrière moi. Pour qui est-ce qu’elle se prend ? En plus, c’est une sale menteuse car il n’y a personne qui attend dans ce couloir.
Je suis tellement en colère ! Et j’ai envie de pleurer aussi. Qu’est-ce que je fais maintenant ?
Et puis, je m’attendais à quoi de la part de ceux qui punissent ma soeur car elle est lesbienne ? Je me sens stupide.
J’ai à peine le temps de me remettre de mes émotions que la cloche sonne. La pause de dix heure est terminée. Je veux rentrer chez moi.

==

J’arrive enfin devant chez moi. Il fait nuit parce que c’est l’hiver. Il fait froid parce que c’est l’hiver. Et je déteste l’hiver !
Cet entraînement de basket était… Gênant. Trilo a su, je ne sais comment, que j’avais cafté à la CPE et il n’était pas content. ça a beau être un blondinet, il fait une tête de plus que moi. Faut dire qu’il est en première sachant qu’il l’a redoublée. Tout le groupe de Scapania était là durant l’entraînement. À la fin de celui-ci, ils ont commencé à me prendre la tête. Les autres coéquipiers ont rappliqué pour essayer de calmer le jeu, mais ça l’a juste envenimé. On s’est tous mis à hausser le ton, y'avait rien de constructif. Le Coach est intervenu et nous a fait un discours sur la cohésion d’équipe, la bonne humeur et blablabla. En bref, il veut qu’on s’entende bien pour bien jouer ensemble et écraser les autres clubs.
C’est vrai que c’est bien de s’entendre les uns avec les autres. Mais les affiches sur le harcèlement à l’école ne disent-elles pas justement que ne rien dire, c’est accepter ? Être spectateur, c’est déjà soutenir les méchants ?
Je ne sais pas. J’ai besoin de conseils sur ce coup là. Je ne sais plus quoi faire.

Le devant de notre maison est une boutique aux grandes vitrines avec un tas de plantes en pot, des grandes et petites pour tous les budgets, pour tous les jardiniers amateurs ou ceux voulant de la verdure dans leur foyer. Le magasin se nomme “l’Aube-Epine”. Ces mots sont écrits sur la devanture dont le fond est une branche d’aubépine en fleur en face d’un lever de soleil. Je rentre dans la boutique de maman avec mes clefs. à cette heure-ci, plus personne n’achète de fleur. Ma mère est fleuriste. Une pro des compositions ! C’est ce que disent les clients. Parfois, je l’aide en tenant la caisse ou en rangeant des trucs.
Je dois traverser la boutique pour rentrer chez moi. J’ai la flemme d'allumer la lumière donc je dois faire attention à ne pas trébucher sur un sac de terreau ou un truc du genre. Heureusement que la boutique n’est pas très grande. En passant la porte arborant un panneau “Staff Only”, on entre sur un minuscule couloir. En face, la cuisine-salle à manger. à gauche, un chiotte. Et à droite, l’escalier tournant et étroit menant au salon. J’y monte. Le parquet craque sous mes pieds.
À peine en haut, Rosifo me saute à la gorge pour m’embrasser la joue. Il était en train de jouer à Mario Kart avec notre mère qui vient également m’embrasser. Elle m'annonce qu'elle n'a pas réussi à me trouver un psychiatre qui accepterait de me prendre. Pas de psy, pas de traitement. Je suis déçu, mais honnêtement, je m'y attendais. Et je sais qu'elle fait de son mieux pour trouver.
Notre salon est petit. Il y a tout juste la place d’y mettre une télévision sur un meuble, un canapé, le tapis oriental précieux que maman a déniché dans une brocante et qu’il ne faut surtout pas abîmer sinon on sera punis, ainsi que quelques rangements. Ce salon mène à quatre pièces : La salle de bain, la chambre de maman, la chambre que je partage avec mon frère et la chambre de Monogie. C’est là que je me dirige.
-Joue avec ton frère, je vais préparer le dîner ! Me lance maman en descendant les escaliers.
Sérieux, j’ai autre chose à faire. Mais il a des étoiles dans les yeux alors je lui promets de jouer autant de parties qu’il veut à condition qu’il me laisse dix minutes pour parler à Monogie. Il accepte et s’en retourne à ses propres occupations.
Je frappe à la porte de ma sœur. Elle l’a décoré avec un panneau “Attention, chien méchant” de rottweiler qu’elle a dû piquer quelque part. Elle ne répond pas alors je rentre.

Elle a son casque et fixe son téléphone, allongée dans son lit. Elle doit certainement regarder une série. Sa chambre est minuscule. Elle a un lit en mezzanine qui lui permet d’avoir une armoire en-dessous ainsi qu’un bureau collé contre le mur avec l’unique fenêtre. Il n’y a pas la place d’avoir plus. à la base, cette pièce est censée être un placard de rangement. Mais aucune adolescente ne veut partager sa chambre avec ses deux petits frères. Je n’ai que deux ans de différence avec elle, mais ça lui en fait six avec Rosifo. Je comprends qu’elle ait besoin de son intimité. Il n’est pas un colocataire facile.
Elle remarque mon intrusion et retire son casque pour m’écouter.
-J’ai besoin de ta sagesse ! Lui dis-je théâtralement.
J’ai réussi à lui décrocher un sourire. Mais il faut que je reste sérieux. Je me met à l’aise sur sa chaise de bureau et lui raconte tout ce qu’il s’est passé depuis le premier graffiti sur le casier d’Atrocine.
-Alors, je dois faire quoi d’après toi ?
-Brûler le bureau de la CPE avec elle dedans.
Je ne lui réponds rien et lui lance mon regard qui dit que ça ne m’amuse pas.
-ça dépend… Est-ce que tu veux garder ton petit confort égoïste ou est-ce que tu veux… La Justice ?
-C’est-à-dire ?
-Si tu choisi de défendre cette fille, ta relation avec l’autre idiot en patira. Et peut-être même que ça sera négatif avec les autres basketteurs. Mais si tu choisis d’arrêter là, bien, y’aura pas de justice. Personne ne va défendre cette fille. Surtout que l’école est au courant et qu’ils s’en battent la race.
-Ouais, t’as pas tord…
C’est pour ça que j’aime bien parler à Monogie. Elle ne passe pas par quatre chemins, elle ne cherche pas à faire l’avocat du diable, elle fonce dans le tas toujours prête à défendre ceux qui en ont besoin. Enfin, c’est comme ça que je la vois.
-Mais comment je l’aide ?
-Est-ce que tu as de bonnes intentions ?
-Comment ça ?
-Est-ce que tu veux la défendre car la situation est injuste ou est-ce que tu veux la défendre car tu crush sur elle et que tu veux être son chevalier sur un cheval blanc ?
Je n’ai pas réfléchi à la question, effectivement. Est-ce que j’aurais fait pareil pour quelqu’un dont je n’aurais pas eu de sentiment ? J’aimerai croire que oui. En tout cas, je veux être ce genre de personne. Je crois.
-Ce ne serait pas de la manipulation ? Genre, être gentil avec quelqu’un uniquement en attendant un truc en retour. Comme un rencard.
-Et tu n’es pas tombé dans le piège de l’incel ! Mes cours sur le féminisme ont payé, je suis fière de toi ! Dit-elle tout en sautant de son lit.
Le parquet entier a tremblé. Maman lui a interdit de faire ça. Monogie se jette sur moi et me fait un câlin. Elle me fait trop rire.
-Tu m’aideras, dis ? Lui demandé-je en essayant de me dégager de son étreinte.
-Tu me dis où cacher le corps, j’apporte la pelle !

==

Nouvelle journée, nouvelles résolutions. Suite à ma conversation avec Monogie, j’ai pris la décision d’aider frontalement et sans hésitation aider Atrocine - mais aussi tous ceux dans le besoin - contre le harcèlement du groupe de Scapania.
Je serais, dès aujourd’hui, le héros stylé et badass près à sauver les oppressés du groupe de vilains avec mes poings. Enfin, mes mots et ma conviction. Je serais sacrément punis si je me bagarrais. Maman dit que ce n’est pas parce que je suis grand, qu’il faut être violent. Monogie dit qu’il est toujours juste et bien de frapper les nazis. Mais elle se fait gronder.

On est dans le couloir à attendre notre prof. Atrocine est sur son téléphone et a des écouteurs dans les oreilles. Peut-être que je devrais aller lui parler ?
Sauf que Scapania et les deux autres débarquent.
-Regardez, c’est le colabo ! Dit-elle.
Je crois qu’elle n’a pas compris la morale de cette histoire.
-J’te ferais remarquer que…
Mais je n’ai pas le temps de lui faire le cours d’histoire sur Vichy que notre professeur arrive. C’est justement cette matière qu’il est censé nous enseigner. Peut-être viendra-t-il sur ce sujet aujourd’hui. En tout cas, l’altercation est terminée. Et je n’ai pas respiré l’héroïsme.

==

ça y est, mon moment pour briller est arrivé. Et j’ai les chocottes comme jamais. Atrocine est sur un banc en train de lire un manga. Elle est vraiment parfaite. Enfin, je veux dire… Je crois qu’elle fait ça à chaque récré. Je ne l’avais jamais remarqué car d’habitude, je traîne au club d’échecs parce que la salle est chauffée et que mes amis y sont. Mais j’ai pris une résolution alors je me suis sacrifié et je suis dehors, dans le froid. Et Scapania et son groupe n’ont pas non plus raté le rendez-vous. Ils forment un arc de cercle en face d’elle pour ne pas qu’elle puisse partir. Elle a le visage tout rouge. Je me suis promis d’intervenir. Il faut que je le fasse.
Allé ! Je prends une grande respiration et j’y vais. Je me dirige un pas à la fois vers eux. Une fois à leur hauteur, j’attrape l’épaule de Scapania et la retourne vers moi brusquement.
-Hey ! Fait-elle visiblement aussi énervée que surprise.
-Laissez-la tranquille ! Dis-je en essayant de cacher le tremblement de ma voix.
Mais Trilo n’est pas content et me demande à quoi je joue.
-J’ai dit, laissez-là tranquille ! Partez et arrêtez d’embêter Atrocine !
ça y est, je n’ai plus la voix qui tremble. Je suis énervé et prêt à en découdre. S’ils veulent la bagarre, je suis leur homme !
-T’es vraiment qu’un minable… Me dit Trilo tout en tournant les talons.
Ses amis le suivent. J’ai gagné.
Une fois qu’on est lancé, ce n’est pas si compliqué ! Alors, pourquoi est-ce que j’ai envie de pleurer ?
Ils sont partis, mais Atrocine ne dit toujours rien. Je sens pourtant son regard dans mon dos. Je me retourne vers elle et la regarde dans les yeux. Et le temps passe. Et ce blanc devient vraiment gênant.
-Hey… Dis-je en lui faisant un signe avec la main.
Je me sens soudain très mal à l’aise. Je me gratte la tête et remet mes vêtements en place. Et vu qu’elle ne dit toujours rien, je décide de partir.
-Non, attends ! Dit-elle en se levant du banc, comme pour physiquement me rattraper.
Sa voix… Je ne l’avais jamais entendu aussi clairement. Je me retourne pour à nouveau lui faire face.
-Merci… D’être intervenu.
Elle regarde ses chaussures abîmées.
-De rien, Atrocine.
ça me fait si plaisir de pouvoir l’appeler par son prénom.
-Euh… Tu me connais ?
-Ben… On est dans la même classe…
Qu’est-ce que ça veut dire ? Elle ne m’a pas remarqué ? ça fait pourtant trois mois qu’on est dans la même classe et qu’on se côtoie cinq jours par semaine ! On est vingt-et-un dans la classe et on n’est que deux métisse.  J’ai l’air si banal que ça ?
Elle est devenue toute rouge. Je crois qu’elle s’est rendu compte qu’elle m’a vexé.
-Ah oui… Tu es… Euh…
Elle essaie vraisemblablement de se souvenir de mon prénom, mais je n’ai pas l’impression qu’elle y arrive.
-Lae… Tenté-je pour l’aider.
-Laevi ! Répond-elle.
C’est bon, au moins, elle s’en souvient. Avec un peu d’aide, certes.
Elle s’excuse en disant qu’elle n’est pas douée avec les prénoms, ni les visages. J’espère qu’elle se souviendra de moi, la prochaine fois.
Elle s'assied sur le banc, visiblement prête à reprendre sa lecture. Je me mets à côté. Elle a un mouvement de recul, alors je me décale un chouïa pour qu’elle se sente plus à l’aise. Puis, je commence à lui raconter dans les grandes lignes ce que j’ai remarqué. J’évite de parler de mes interventions car je ne veux pas donner l’impression de me vanter, ni qu’elle se sente redevable.
Elle me dit qu’elle sait ce que Scapania et les autres font, mais que ça s’est atténué ces derniers temps. J’évite de parler de mes interventions car je ne veux pas donner l’impression de me vanter, ni qu’elle se sente redevable. Mais ça me fait plaisir de me dire que c’est grâce à moi, que ce que j’ai fait a eu une importance.
Je lui demande si elle sait pourquoi ils agissent comme ça envers elle et elle détourne le regard sans répondre. Il y avait une peau de banane juste en face de moi et je viens misérablement de glisser dessus.
==
Je suis tellement heureux ! On est vendredi soir, je viens de terminer mon entraînement de basket et j’ai rencard avec Atrocine. Bon, d’accord. C’en est pas un. C’est juste une sortie entre potes. Et franchement, tant mieux. Parce que je pue. J’attends en face du lycée, emmitouflé dans mon écharpe. J’ai hâte qu’elle arrive car j’ai froid. Je réarrange mon bonnet correctement sur ma tête et me souffle dans les mains. J’aurais dû mettre des gants.
Atrocine m’a dit qu’elle viendrait me chercher après mon entraînement. Mais ça fait quelques minutes que j’attends.
Justement, la voilà. Elle marche calmement vers moi.
-Oh, tu es déjà là… Tu prends ta douche vite… Me dit-elle l’air embarrassée.
Mince, c’est pour ça qu’elle a pris son temps. Je ne peux pas lui dire que je n’en prends pas parce que ça me ferait passer pour un gros crado.
-Non, je viens d’arriver, t’inquiète !
Elle semble soudainement soulagée par mon mensonge. Je n’aime pas trop mentir, mais c’est pour le mieux ? Et pour ma réputation aussi.
-Tu m’a dit que tu voulais m’aider alors…
Elle se tripote les cheveux et son regard est fuyant. Elle est encore plus mauvaise que moi pour tenir une conversation. On a pourtant réussi à bien parler l’autre jour à la récré. Et c’est vrai que j’ai dit que je voulais l’aider.
Elle me sourit avant de tourner les talons et de remonter l’allée principale. Je crois que c’est la première fois que je la vois sourire. J’imagine que la perspective du week-end rend n’importe quel adolescent heureux. Je la suit.

Pour l’instant, c’est le chemin vers ma maison. Sauf qu’on s’arrête et qu’on tourne à gauche, dans la ruelle où elle nourrit parfois des chats. Les gamelles semblent pleines.
Elle rentre alors dans un des bâtiments. Dans ce quartier, les maisons sont étroites et hautes d’en général quatre à cinq étages. Je remarque alors qu’il y a un panneau délavé avec écrit “P’tit Câlinou” au-dessus du dessin d’un chat noir et blanc cartonesque.
Deux dames aux cheveux grisonnants nous accueillent.
-C’est lui ton ami, Atrocine ? Il a l’air charmant ! Fait l’une d’elle en mettant sa main sur mon épaule.
-Laisse donc respirer ce jeune garçon ! Lui lance l’autre.
Et je suis bien d’accord avec elle !
-Je vous présente Laevi ! Laevi, voici Sandrine et Clothilde. Elles sont les gérantes de ce refuge.
Atrocine semble avoir perdu sa timidité. Comme si elle se sentait bien ici. à sa place. Les dames la touchent. Elles se regardent dans les yeux. Et la voix d’Atrocine est nette et audible, comme quand elle a voulu m’empêcher de partir. Je suis content de la voir comme ça, mais ça veut également dire qu’en général, elle a peur d’être elle-même.
-On est bien contente que tu aies proposé ton aide, on avait bien besoin de jeunes bras supplémentaires ! Me dit Sandrine en me donnant une perceuse et en m’attrapant le bras pour me guider vers la pièce du fond.
Quand est-ce que j’ai dis une chose pareille ? J’essaie d’y réfléchir… Maintenant que j’y pense, j’ai proposé mon aide à Atrocine. C’était au sujet du harcèlement. Néanmoins, elle avait effectivement parlé des chats errants juste avant. Je crois que je suis responsable de ce malentendu. Il ne me reste plus qu’à tenir cette promesse accidentelle !
La pièce en question est remplie de chats qui jouent avec des cartons. C’est plutôt grand et il semble y avoir tout ce qu’il faut pour les félins ; arbres à chat, gamelles, litières et jouets.
On m’explique que les chats dehors sont trop sauvages, que si on les mettait dedans, ils deviendraient fous. Les dames me disent qu’elles recueillent des chats errants, les soignent puis leur cherchent une famille. Elles ont un visage rayonnant en me racontant que depuis qu’Atrocine prend leur pensionnaires en photo et les aide avec leur page internet, les adoptions ont augmenté. Je suis impressionné.
-Wow, t’es vraiment une bonne personne ! Dis-je en me retournant vers Atrocine.
Avant de rougir comme un idiot. Je n'en reviens pas d’avoir dit ça tout haut ! Elle aussi semble gênée par mon commentaire. Par contre, ça a l’air d’amuser les adultes.
-On a reçu les parcours muraux pour chat à installer ! C’est pour ça qu’on a besoin de jeunes gens gentils et investis comme vous ce soir ! Explique Sandrine pour couper court au malaise.
C’est un beau projet, quand on y pense. Je suis heureux d’y participer et d’aider, même si je n’ai pas fait exprès. En plus, ça reste un moment amusant et précieux passé avec ma nouvelle amie.
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Depuis lundi, on ne se quitte plus au lycée. Ça s'est fait juste comme ça, de manière ultra naturelle. On n’en a même pas parlé. Après avoir terminé l’installation du parcours pour chat, on s’est échangé nos numéros de téléphone et je l’ai raccompagnée jusqu’à chez elle. C’est mon côté galant. Elle n’habite qu’à un quart d’heure de chez moi en vrai. Alors, vu que ce dimanche j’étais au square, je l’ai invitée à venir jouer au basket avec mon frère et moi. Et elle est venue. C’était un jour parfait, il faisait froid, mais il n’y avait pas de vent et le soleil brillait. Donc, l’activité physique a suffit à nous réchauffer. Elle n’est pas douée, mais à nous deux, on a réussi à épuiser un peu Rosifo et honnêtement, c’est déjà une prouesse en soi.

À l’école, j’avais peur que Fraxy soit jaloux. Sauf qu’il apprécie beaucoup avoir une personne en plus à qui parler de manga. C’est toujours agréable quand nos amis aiment nos autres amis. Et il nous a même invité chez lui après les cours aujourd’hui. Pour déjeuner et traîner ainsi que faire nos devoirs. Un peu. On n’a pas cours les mercredis après-midi.

Actuellement, on vient de sortir du bus et de marcher en direction de son immeuble. On n’est pas dans la ville la plus grande du monde donc on n’a pas de gratte-ciel comme dans les films, mais je reste impressionné. On n’a pas de bâtiments comme ça dans mon coin de la ville.
C’est la première fois que je rencontre la famille Jeogjae. Les parents de Fraxy sont traducteurs. Sa mère franco-japonais et son père franco-coréen. Ses parents sont venus faire leurs études en France pour perfectionner leur maîtrise de la langue. Sur les bancs de la faculté, ils sont tombés amoureux et ont décidé de rester vivre de ce pays. Fraxy est fier de l’histoire de ses parents, il n’hésite pas à enjoliver et romantiser leur rencontre dans la ville de l’amour qu’est Paris. Et ça fait que Fraxy est trilingue. Il voyage régulièrement au Japon et en Corée du Sud voir ses grands-parents. C’est ce qu’il m’a dit. Il a promis de me rapporter des goodies après l’un de ses prochains voyages. Je l’envie un peu. Je ne vais jamais voir mes grands-parents aux Pays-Bas. On reçoit juste une carte d’eux chaque Noël. Ma mère est née et a grandi en Normandie. Quand elle était jeune adulte, son père a perdu son travail et ses parents sont retournés au Pays-bas. Maman était en alternance et voulait terminer ses études avant de les rejoindre. Peu après, elle a fait probablement la pire rencontre de sa vie qui l’a fait rester ici. Il ne lui a jamais laissé nous apprendre le néerlandais. Il avait peur qu’on se ligue contre lui. Mais, c’est peut-être la peur de déménager dans un pays inconnu qui a poussé ma mère à rester.

Fraxy nous ouvre la porte et la maintient ouverte pour nous inciter à entrer. Il nous demande d’enlever nos chaussures. Sa famille a prévu des chaussons pour les invités. Leur appartement est au dernier étage. Il est plutôt grand et lumineux. La décoration rappelle l'Asie et est très raffinée. Ses parents nous accueillent. Sa mère en nous faisant la bise et son père en nous serrant la main. Ses parents sont bien habillés, dans un style plutôt chic. C’est presque étonnant qu’ils laissent leur fils unique sortir habillé comme un otaku de la classe populaire. Je dis fils unique, mais plus pour longtemps au vu du gros ventre rond de sa mère.
Fraxy nous guide vers sa chambre. Sa mère nous dit qu’elle va nous apporter des boissons et de quoi grignoter pour qu’on patiente jusqu’au repas. Son père ajoute qu’il est content de tester une recette végétarienne, mais nous demande clémence sur la note. Il est drôle. Ses parents sont souriants et ont l’air gentils et attentionnés. 

-Mon pote, tu vas avoir un petit adelphe ? Dis-je avec enthousiasme, une fois la porte fermée derrière nous.
-Une petite sœur, normalement. Me répond-il gêné, mais avec une pointe de fierté dans le sourire.
-Tu dois avoir tellement hâte ! Renchéri Atrocine.
-Oui, mais ça me fait flipper. C’est dur d’être un grand frère ?
Il s’est tourné vers moi, les sourcils froncés. Il a cet air sérieux lorsqu’on débat de sujet très sérieux comme qui est le plus fort entre Sasuke et Naruto.
-Je ne me souviens plus de quand mon frère est né, j’étais trop jeune. Et quand j’ai eu l’âge de pouvoir m’occuper des autres, ce n’était plus un bébé. Il savait déjà marcher et parler. Il est grand, alors qu’un bébé ça a genre zéro autonomie.
Il fait la moue et soupire. Ma réponse honnête n’était pas les encouragements dont il avait besoin. J’aurais peut-être dû me contenter de le rassurer ?
-J'aimerais bien avoir un petit frère ou une petite soeur, mais ça voudrait dire que je devrais partager ma chambre. Ajoute Atrocine.
Je n’ai pas l’impression qu’elle ait compris les doutes, craintes et tourments de Fraxy. Elle a juste continué sur le sujet. Peut-être que ça lui changera les idées, au moins.
-On a installé la nouvelle chambre dans le bureau de mon père. Maintenant, mes parents partageront leur bureau. On a peint la chambre en rose tous ensemble. C’était amusant, mais maintenant j’espère que ça ne sera pas un garçon !
-Pourquoi ?
-Euh bien…
Et là, il se tait. Il a compris à mon air suffisant que je me suis moqué de son genrage d’une couleur. On finit par éclater de rire tous les deux. Atrocine a l’air confuse, mais semble éprouver du plaisir à nous voir rigoler.
Alors que Fraxy sort une caisse de sous son lit, sa mère frappe à la porte. Elle rentre ensuite après l’accord de son fils. Chez moi, ma mère frappe pour prévenir, puis rentre d’un coup. Je ne juge pas, je fais pareille à Monogie.
Elle nous dépose un plateau avec des biscuits et jus de fruits puis repart. Fraxy a réussi à extraire sa caisse en carton et en sort un tas de mangas que je ne connais pas.
-Ce sont des titres qui ne sont pas encore sortis en France que mes parents ont traduits. Je ne les ai pas encore découverts, mais ça sent la niche et le chef-d’œuvre ! Nous explique-t’il.
Il a des étoiles dans les yeux et Atrocine aussi. Cet après-midi va être un régal !

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Honnêtement, tout se passe pour le mieux ces temps-ci. Il y a encore des vilains mots sur le casier d’Atrocine de temps en temps, mais on les efface à deux. Parfois, même à trois puisque Fraxy nous a rejoint. Les autres membres du club d’échecs nous boudent un peu. Ils disent qu’une fille sème nécessairement la discorde dans un groupe d'hommes. C’est ridicule. Je ne les pensais pas misogyne comme ça. Le harcèlement direct a cessé. Pour l’instant. Trilo calme le jeu parce qu’on va bientôt avoir un match de basket important contre une école adverse. Et notre équipe est importante pour nous tous. Je ne peux pas lui reprocher son manque d’engagement, c’est sûr. Et puis, moi aussi j’ai envie de gagner. On s’entraîne depuis un petit bout de temps maintenant et ça sera mon premier vrai match. C’est ce vendredi après les cours, à la place de notre session qu’il aura lieu. Dans notre gymnase. Après, ce sera les vacances de Noël. On ne pourra pas traîner avec Fraxy car il va dans sa famille japonaise pour les fêtes. Par contre, on a dores et déjà prévu de se voir avec Atrocine.

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J’ai tellement le trac ! J’ai la nausée aussi.
C’est le moment ! On entend un brouhaha terrible depuis les vestiaires. le gymnase doit être plein à craquer. Notre coach nous rappelle vite-fait la stratégie prévue et nous encourage. Qu’on soit prêt ou non, c’est l’heure d’aller sur le terrain.
On passe les portes et effectivement, beaucoup de monde est là. Je ne parviens pas à repérer ma famille dans cette foule. Tant pis, je sais qu’ils sont là et ça me suffit.
Nos adversaires arrivent également sur le terrain. Ils sont comme nous, des lycéens entre quinze et dix-neuf ans. Certains sont grands ou un peu moins, maigre ou gros, des binoclards ou sourire-de-fer, et de toutes les origines ethniques. On est entre adolescents boutonneux aux cheveux gras et en sueur à cause du stress.
Quant au public, c’est nos familles ou d’autres lycéens et leurs familles.
Tout le monde se place et au coup de sifflet, le match commence !
J’ai l’impression que ce match dure depuis trois secondes et une éternité à la fois. Je suis épuisé ! Demain, c’est promis je ne me réveille pas avant midi ! Non, quatorze heure !

J’ai réussi à marquer quelques paniers, mais je n’ai pas brillé non plus. C’est Dianth, notre capitaine qui porte l’équipe, clairement. Justement, il me fait signe de me placer. Je crois qu’il veut tenter une percée. Il s’avance et lorsque deux défenseurs sont sur lui, il me passe la balle. Je suis encore trop loin pour tenter de marquer et les défenseurs adverses l’ont vu venir et sont déjà sur moi. D’un regard, je repère Trilo de démarqué. On est en froid, mais je tiens vraiment à ce match. Je lui passe la balle, il se rapproche et se fait bloquer, mais il tire et… Panier !
La stratégie de notre capitaine a porté ses fruits. On se félicite d’un signe de tête et on se replace. Ce n’est pas fini.
La sonnerie de fin de match retentit. C’est fini. Et on a gagné. De quelques points. D’abord, on s'applaudit. Notre propre équipe et nos adversaires. Ils ont super bien joué aussi ! Dianth nous fait tout signe de s’approcher et initie un câlin groupé. On partage notre sueur en se félicitant les uns les autres. Notre coach débarque et il est ravi également. Mon équipe part ensuite à la douche. On a tous hâte de se débarrasser de notre sueur. J’attrape mon sac dans les vestiaires ainsi que ma veste et retourne sur le terrain pour chercher ma famille. Je suis trop dégoulinant pour me changer.

Ce sont eux qui me trouvent. Maman m’attrape la joue pour l’embrasser tandis que Rosifo raconte les moments les plus funs du match. Au cas où j’aurais déjà oublié. Atrocine est là aussi et me demande pourquoi je ne me douche pas.
-L’eau est trop froide ? Tenté-je sans grande conviction.
Je n’ai plus l’énergie de mentir là, il ne faut pas trop m’en demander. En tout cas, ça fait bien rire Monogie.
-T’inquiète pas pour lui, il préfère juste attendre d’être à la maison. Dit-elle pour m’aider à me sortir de cette situation.
En tout cas, ça semble suffire à Atrocine. Il y a un homme derrière elle. Grand, blond et maigre, l’air sévère et serein à la fois, il nous salue poliment et nous souhaite une bonne soirée. Atrocine part avec lui. On ne peut pas dire que son père lui ressemble vraiment.
-Elle est mignonne ta copine, tu l’inviteras ?
-Maman ! Dis-je.
Atrocine vient à peine de partir. Et si elle avait entendu ? Comme les adultes peuvent être gênant parfois.
-Rousse et grosse, je comprends pourquoi elle se fait harceler. Se permet de commenter Monogie.
-Elle n’est pas grosse.
Je veux dire, ce ne serait pas un souci si elle l’était, mais en étant objectif, elle ne l’est pas.
-T’es le seul maigre de la famille, t’es biaisé. Répond-elle avec ce sourire.
Le sourire qu’elle fait quand elle gagne un débat ou qu’elle est sûre de gagner un débat. ça veut dire qu’il vaut mieux que je me taise. Il faut savoir admettre sa défaite, surtout face à sa grande sœur.

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Une randonnée en montagne ? Atrocine m’a envoyé un itinéraire sur Messenger pour qu’on y aille ensemble. J’aime bien ça, marcher. Mais je n’ai jamais fait ça sans adulte. Aujourd’hui, on n’est rien que tous les deux. Maman a hésité, mais Monogie m’a aidé à la convaincre. D’autant plus qu’Atrocine m’a confirmé y être déjà allée. Le discourt de ma sœur était parfait. Une tirade sur la responsabilité en appuyant sur à quel point je suis un bon garçon, bien sage et débrouillard. Elle a ajouté que la nature représente peu de risque au final, qu'on était deux avec chacun un téléphone pour appeler les secours ou les parents. Rosifo a hoché de la tête avec un air faussement sérieux tout le long. Maman n'a pas pu dire non.

On descend du bus, dans l’un des villages de la région. L’église fait office de point de départ. Il suffit de suivre les balises jaunes. La météo est clémente et j’ai du cake salé en pic-nique. Mon amie me raconte qu’elle veut aller à un certain “spot” où il y aurait un busard cendré qui chasse régulièrement. Elle a amené ses meilleurs zooms et veut le photographier. Au début, je ne comprenais pas pourquoi elle avait dit qu’on allait y être pour toute la journée alors que son itinéraire dure trois heures. Maintenant, je comprends. On s’arrête dès qu’elle entend un oiseau gazouiller pas très loin. Elle me parle alors d’eux, de leur comportement et de comment les reconnaître. Rien qu’au chant, elle sait parfois à quoi elle a affaire. 

Elle vient de prendre une photo d’un rougequeue à front blanc et me montre le résultat. La photo est vraiment réussie ! Je ne m’y connais pas, mais je trouve ça joli. Elle remet soigneusement son appareil photo dans sa sacoche et on reprend la route. Elle m’attrape la main. ça me surprend sur le coup, mais j’essaie de ne pas trop réagir. Je ne veux pas qu’elle la retire. On marche, en se tenant la main. Le froid ? Quel froid ? J’ai le cœur qui bat la chamade.
On arrive enfin au fameux spot. On décide d’y manger pour patienter en espérant que le rapace se ramène. On se blottit l’un contre l’autre en se partageant nos desserts. D’accord, j’avoue je suis aux anges ! Je passe vraiment un super moment. Et on s’est tenu la main.

On arrive pratiquement à l'arrêt de bus. On a eu beau attendre, on ne l'a pas vu ce busard. Notre belle balade est terminée. On est un peu à l'avance sur l'horaire. En plus, il n'y a que nous deux. On s'assied sur le banc de l'abribus et on attend.
Je mets mon bras autour de sa taille pour la blottir contre moi, elle accepte ce geste et se colle volontiers à moi. Je pose ma tête sur la sienne. La position n'est pas aussi confortable que je l'aurais pensé parce que je suis vraiment trop grand par rapport à elle. Faut dire qu'elle m'arrive à peine au-dessus des épaules. Mais je profite de ces quelques minutes l'un contre l'autre.
Sauf que j'ai envie de plus. Cette journée est vraiment parfaite, je dois lui demander.
-Euh... Tenté-je, sans trop de succès.
Je suis trop nerveux. Elle se tourne légèrement vers moi en essayant de se détacher le moins possible et me regarde dans les yeux. Elle a le sourire calme. Je pense qu'elle est heureuse d'être ici avec moi. Elle rougit un peu aussi, mais je ne sais pas si c'est à cause de moi ou du froid.
-Est-ce que tu veux... Sortir avec moi ?
J'ai osé ! Ça fait du bien de le dire et j'ai un énorme sourire qui me fend le visage. Je suis trop content, je ne peux pas m'en empêcher.
-En couple, tu veux dire ? Me demande-t-elle en se tournant complètement vers moi.
On est aussi nerveux l'un que l'autre. Son sourire s'est autant accentué que le mien et elle attrape ses joues des deux mains pour tenter de le contrôler.
J'acquiesce de la tête alors, elle aussi.
D'un point de vue extérieur, on ne doit pas avoir l'air très malin. Mais actuellement, seule elle compte pour moi. Je place mes mains au-dessus des siennes qui sont toujours collées à ses joues et je l'approche de moi pour initier un baiser. Elle retire ses mains, m'attrape les épaules et se rapproche le plus qu'elle peut en fermant les yeux. Je pose mes lèvres sur les siennes et ferme les miens. Je peux sentir son sourire, sa respiration saccadée et sa chaleur. C'est doux et me fait complètement oublier le froid que je déteste d'habitude.
On est heureux.
On continue d'attendre le bus le bus en se faisant des câlins et des bisous sur les lèvres et les joues.

Celui-ci finit par arriver. On monte dedans et on passe le trajet blotti.
Définitivement, cette journée ne pouvait pas être plus parfaite.
Je suis déjà sorti avec quelqu'un avant Atrocine. Cerise était chouette et gentille, mais c'était une lâche. Quand les choses devenaient moches au collège, quand les autres disaient des choses méchantes et blessantes sur qui je suis, ce que je suis, elle ne disait rien. Elle ne m'a jamais défendu. Et un jour, après moins d'un mois de relation, elle en a eu marre de ce qu'on disait sur moi, sur notre couple. Alors, elle m'a quittée. Je peux la comprendre, mais j'aurais voulu du soutien de la part de ma petite amie. J'avais besoin de soutien.
Je pense qu'avec Atrocine, ce sera différent. Les choses vont mieux maintenant et j'ai confiance en elle pour être de mon côté. Je devrais peut-être lui dire ?
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