[Chapitre 6 : Utopie naturelle ] Le contrôleur du temps

Résolu à situer leur siège, il tenta de suivre les ombres dès qu'il en voyait une, en vain. Il avait conclut que ces créatures n'étaient pas humaines. Ou qu'elles étaient dotées de pouvoir, comme lui. Il ne savait pas et il n'avait pas vraiment envie de savoir... Il se retrouva devant un immense pont fait de bois brut. La végétation le colonisait. Des lianes le maintenaient suspendu au dessus d'une falaise. En bas, en se penchant un peu, il pouvait apercevoir de l'eau. Très peu d'eau. Il posa une main sur la rambarde boisé et s'engagea avec peu d'assurance sur le tronc. Il grinça, se balança mais ne céda pas. Le cœur du barbu ratait quelques battements à chaque oscillations. Il ferma les yeux et se crispa sur les branches que tenait ses mains. Devant lui s'élevait vers le ciel une très haute falaise. La végétation ne pouvait manquer dans ce paradis terrestre. Plusieurs fois, il évita une entité volante qu'il n'arrivait pas à identifier, malgré la proximité. Il continuait son chemin sur le pont végétal, entouré par les branches d'un bouleau parasol, une sorte de saule pleureur plat. De petites fleurs colorés vinrent effleurer de leurs pétales ses mains. Il se laissait aller à l'extase, ébahi devant le spectacle naturel autour de lui. Il prit bien vingt minutes à retrouver la terre ferme. Et il ne fut point déçu : une clairière s'offrait à lui, parsemée de petits buissons remplis de baies comestibles. Il en saisit une et la mangea. Elle avait fort bon goût, il trouvait, et ses sensations gustatives qui se réveillaient sur sa langue et son palais ne rendait que plus divin le fruit. Son dernier repas datait d'il y a plusieurs jours et, s'il n'avait pas ressenti le besoin de se nourrir, c'était à cause de la tension qui régnait dans son esprit. Mais désormais, cette envie se réveilla et il eut tout à coup grand faim. Il décida de se nourrir d'encore quelques baies avant de découvrir derrière les ombres d'un arbre un fruit semblable au fruit du dragon avec sa couleur rouge. Il leva la main vers le pitaya et le détacha de son arbre ressemblant à un palmier. Il sortit sa dague et coupa le fruit en deux dans sa longueur avant de porter l'une des deux parties à sa bouche pour manger la chair blanche à pépins noirs. Il se délectait de la délicieuse saveur du pitaya pareil au goût du kiwi. Il termina son repas et chercha du regard une sortie. Il en trouva une derrière les feuilles d'un chêne massif. Ses yeux commencèrent à brûler tant la fatigue se faisait sentir dans son esprit. Il regarda l'extérieur au travers de l'envahissante nature mais ne parvint qu'à discerner de vagues teintes orangées. Le soleil se couchait. Il décida de reporter l'exploration du reste de l'utopie eu lendemain. Il s'avança jusqu'à un coin suffisamment dégagé et chaud et s'y allongea. Il sentit alors contre sa peau des battements, comme si un cœur se trouvait au dessous de la terre. Il ferma les yeux et se laissa bercer par les régularités sonores du sol.

Il se réveilla alors que les rayons du soleil étaient déjà bien haut dans le ciel peinaient à traverser le rideau de feuilles entourant la clairière. Il se releva doucement, encore un peu endormi. Il marcha jusqu'au chêne et, jetant un dernier regard circulaire à l'endroit, il s'engouffra dans le tronc creux du gigantesque arbre, centenaire sûrement. Il se retrouva dans un tunnel d'une dizaine de mètre à peine et bas de plafond. Les parois étaient étroites. L'homme en manteau, du haut de son mètre soixante-quinze, devait se baisser pour avancer dans le petit passage. Au bout, il voyait la lumière solaire. Il passa sans trop de problèmes l'arbre et prit ses aises alors qu'il arrivait dans une sorte de petit village qui semblait inhabité. D'apparence seulement. En regardant de plus près par le fenêtre sans vitre des habitation ronde et en terre, Rosgrim remarqua que de jeunes gens s'affairaient au différentes tâches quotidiennes. Une tranquillité régnait dans ce havre de nature. Depuis longtemps, le contrôleur du temps n'avait ressenti autant de sérénité et d'apaisement. Il vit aussi que les habitants de l'utopie se revêtaient d'habits de toile brune. Malgré la simplicité de leur vêtements, ces derniers paraissaient tout de même travaillés : une découpe parfaite mettait en valeur leurs corps fins et la matière paraissait douce malgré sa grossièreté d'apparence. Il était ébloui par l'organisation de ce village. Une chose le frappa tout de même : leurs habitations semblaient ingrates mais elles relevaient en réalité d'une merveilleuse ingéniosité. Ils travaillaient donc la simplicité sans se soucier d'autres problèmes. Ces hommes, femmes et enfants paraissaient tellement serein... Détachés du monde dystopique, mauvais et pollué de l'extérieur. Renfermés dans leur monde de rêves et de joie. Dans leur bulle merveilleuse et naturelle. Il voulait les rejoindre à jamais mais au dessus de cela, il voulait sauver le monde de l'institution malsaine qui semblait vouloir prendre le pouvoir. Incertain, il fit un pas. Après sa vue, son ouïe fut requise pour enregistrer les informations. C'était comme s'il passait des couches pour arriver au noyau. Tout prenait plus de vie et de gaieté. Des cris d'enfants retentissaient, des oiseaux sifflaient doucement, avec harmonie, le vent faisait bruisser les feuilles des nombreuses plantes, la déchirure d'une toile qu'on travaille perce l'air, des discussions de ci de là créaient un bruit de fond pas désagréable. Il entendait tout, même le battement d'aile d'un papillon aux multiples couleurs qui passaient près de lui. Enchanté par le cadre plus qu'idyllique, il se laissa porter par la joie ambiante, oubliant tout de l'extérieur. Il revint à la réalité quand des cris déchirèrent le village. Des cris de femmes. Tout le monde se tut. On pouvait alors entendre la respiration saccadée de la femme qui venait de crier. Après plusieurs longues minutes de hurlements, les pleurs d'un bébé se firent entendre. C'était ça, alors, une naissance avait lieu en ce moment même... Il marcha vers la source du bruit, comme certains autres habitants, et arriva dans une hutte. Il vit la mère prendre son bébé et fut attendri par cette vision. La maman souriait. Réconfort après l'intense douleur, elle observait le petit être gesticuler dans ses bras. Personne n'osait bouger par peur de briser ce moment. Au bout d'une demi-dizaine de minutes, le brun se retira et fit le tour du village. Une petite tête blonde le heurta alors qu'il passait à côté d'une maison. Le petit garçon tomba au sol. Rosgrim eut d'abord un mouvement de recul avant de tendre la main au frêle garçonnet. Celui ci la prit et le plus vieux l'aida à se relever.
« D-désolé monsieur... »
L'homme au manteau sourit.
« Ce n'est pas grave. »
Le jeune enfant lui rendit son sourire avant de se remettre à courir, poursuivit par une jeune fille en robe blanche avec une longue chevelure ondulée et noire volant au vent, comme une traîné sinueuse derrière elle lorsqu'elle courait. Les deux enfants jouaient à chat. Cela rappela des souvenirs à Rosgrim, ce qui le rendit triste. Il sentit une larme rouler sur sa joue sans qu'il ne se rende compte et la sécha avant de se remettre à explorer le bourg.